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[center]La rareté du poisson encourage les prises illégales[/center]
LE MONDE | 12.09.06 |
Enjeu environnemental contre enjeu économique. Si la bataille a été aussi rude, fin août à Marseille, c'est qu'écologistes et thoniers avaient à l'esprit la réunion de la Commission internationale pour les thonidés de l'Atlantique, prévue en Croatie, fin novembre. C'est là que seront attribués les quotas des prochaines années.
Alors que les scientifiques considèrent que le stock de thon rouge en Méditerranée n'a jamais été aussi bas, les thoniers redoutent la décision d'une baisse de leurs quotas. Il est principalement reproché aux Français la surcapacité de leur flotte. Comme leurs voisins, ils ont réalisé de lourds investissements dans les années 1990 pour ce marché porteur. "La flotte est encore rentable, mais pour combien de temps ?", interroge Hubert Carré, directeur du Comité national des pêches et de l'élevage marin.
Selon les déclarations des pêcheurs, en 2005, 8 000 tonnes de thon rouge ont été capturées, pour 6 000 autorisées. La France ne cache pas qu'elle dépasse son quota, mais le secteur souffre d'une opacité croissante. Les navires européens se regroupent pour pêcher le thon, mettant leur capture en commun, et celles-ci sont, désormais, destinées en majorité aux fermes d'aquaculture. Deux éléments qui rendent impossibles les vérifications. "Plus vous réglementez, plus vous limitez l'accès, plus vous faites la part belle à la pêche illégale parce qu'il y a une demande à satisfaire", résume M. Carré qui regrette que les autorités supranationales soient aussi démunies.
Sur ce marché, il existe de fait une forte pression de la pêche illégale. Les prix élevés auxquels se négocie le thon au Japon, incitant à la surcapacité des flottes, constituent une réelle menace, estime l'Ifremer. En outre, "en Méditerranée orientale, les navires entrent par le Canal de Suez, pêchent, livrent leurs captures à des cargo-surgélateurs, puis repartent sans avoir approché aucun Etat riverain", explique Stephan Beaucher, de Greenpeace.
La Méditerranée n'est pas le seul lieu où s'illustrent les pêcheurs illégaux. Les "pirates" sévissent surtout dans l'océan Pacifique et les zones australes. La communauté internationale tente, avec difficulté, de lutter contre ce fléau, qui persiste parce la pratique reste payante.
Dans un rapport de décembre 2005, intitulé "Pourquoi la pêche pirate perdure", l'OCDE pointait, outre le manque de réglementation internationale et de contrôles, le déséquilibre mondial entre la capacité et les possibilités de pêche. Un problème qui entretient le phénomène : "A mesure que les stocks se raréfient, en partie du fait de la pêche illégale, les quotas des navires respectant les règles rétrécissent. Les opérateurs légaux peuvent alors être tentés de se tourner vers la pêche illégale", expliquaient les experts de l'OCDE.
Pour la FAO, l'organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation, combattre la capacité excédentaire et la pêche illicite est le double enjeu pour que s'installe une pêche durable. Un objectif qui ferait coexister souci environnemental et emploi.