OGM: une reglementation à géométrie variable

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par canardos » 13 Juin 2007, 14:38

a écrit :

[center]Cultures OGM : l'Europe à géométrie variable[/center]

LE MONDE | 13.06.07 |

Pro comme anti-OGM (organismes génétiquement modifiés) sont sur le qui-vive. Déjà l'Allemagne, s'appuyant sur plusieurs études, vient de suspendre la commercialisation des semences, dans l'attente de la mise en place par Monsanto d'un plan d'observation sur l'environnement de son maïs Mon810, le seul cultivé en Europe. Alain Juppé, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, avait déclaré, le 25 mai, qu'il n'excluait pas de "s'inspirer" de l'exemple allemand. Il a depuis, avec la ministre de l'agriculture, saisi la Commission du génie biomoléculaire (CGB). Mais celle-ci devrait rendre, jeudi 14 juin, un avis qui ne sera probablement pas défavorable à la poursuite de ces cultures.

Les producteurs de maïs OGM sont, quoi qu'il en soit, sereins. Alors que les écologistes ont réclamé en vain, durant la campagne présidentielle, un moratoire sur la culture de maïs OGM, la production va augmenter. Selon les dernières estimations de l'Association générale des producteurs de maïs (AGPM), leur syndicat, environ 25 000 hectares de maïs Mon810 viennent d'être semés. Une goutte d'eau, mais près de cinq fois plus qu'en 2006. La culture des OGM s'organise, sa destination demeurant l'Espagne, pour l'alimentation animale.

Pour la première fois les Français vont avoir accès, via Internet, à une carte des cultures de maïs OGM. Le ministère de l'agriculture est en train de vérifier les données adressées par les producteurs, qui, jusqu'à cette année, n'avaient obligation d'aucune déclaration. Ce n'est plus le cas, depuis la publication, le 19 mars, d'un arrêté créant un registre national des cultures OGM. Pas question toutefois d'indiquer au public le nom des agriculteurs. Il sera uniquement informé de la surface des productions par canton. Les producteurs d'OGM sont mécontents, qui plaidaient pour un niveau départemental, jugeant que dans les petits cantons les faucheurs pourront repérer leurs cibles. Les anti-OGM ne sont pas plus satisfaits : sans localisation précise, disent-ils, la surveillance des contaminations sera impossible.

Si l'autorisation de nouveaux OGM est clairement encadrée par la directive européenne 2001/18, les règles de culture, censées garantir la non-contamination entre les productions OGM et les cultures traditionnelles ou bio, sont du ressort des Etats. Tout comme le degré d'information du public ou des agriculteurs voisins. "La directive a vite révélé qu'il fallait des règles de coexistence, mais comme elles semblaient impossibles à trancher, la Commission a laissé les Etats se débrouiller, au motif que la situation agraire différait d'un pays à l'autre, explique Arnaud Apoteker, chargé de campagne OGM à Greenpeace. C'est scandaleux."

La Commission a seulement défini un cadre, appelant à trouver un juste équilibre entre les intérêts des différentes filières. Autrement dit, les règles ne doivent pas viser à empêcher la culture d'OGM. Jusqu'à présent, sept pays ont adopté une réglementation sur la coexistence entre les différents types de culture.


DISTANCES RÉGLEMENTÉES


Le paradoxe est que ces derniers ne sont pas forcément ceux qui cultivent des OGM. La France et l'Espagne, principaux producteurs, n'ont pas de réglementation. Et les pays qui en ont une ne sont pas forcément les principaux producteurs de maïs ni nécessairement ceux qui sont concernés par les invasions de pyrales ou de sésamies, parasites auxquels le Mon810 résiste.

Parfois, les Etats ont fixé des règles sur les distances, mais pas sur l'information du voisinage, comme en Espagne, ou bien s'en tiennent, comme la France, à des incitations. En annonçant la création du registre public, le ministère français de l'agriculture, a précisé qu'il encourageait les producteurs d'OGM à mettre 50 mètres de distance entre leur champ de maïs et ceux de leurs voisins, soit 25 mètres de plus que ce que préconisait la profession. "Il peut être plus facile de respecter les 200 mètres en Slovaquie, avec ses grandes exploitations issues du régime soviétique, que 50 mètres dans le sud-ouest de la France", estime Pascal Coquin, chargé de la réglementation à l'AGPM.

Qu'en est-il ailleurs ? Les choix, pays par pays, ne sont pas anodins : 50 mètres en Espagne, 70 mètres de distance avec le maïs traditionnel et 200 mètres avec le bio en République tchèque, 200 mètres au Danemark, 400 mètres en Hongrie, etc. Au Luxembourg, où un projet de loi sur la coexistence est en préparation depuis 2004, Greenpeace souhaite voir imposer 600 mètres.

Une formation à la culture d'OGM est en outre requise au Danemark comme en Hongrie. Ce dernier pays, pour l'instant, se retranche, comme l'Autriche et la Grèce, derrière une clause de sauvegarde, permettant de refuser un OGM si de nouvelles études indiquent un risque pour la santé ou l'environnement. Des clauses jugées infondées par l'Autorité européenne de sécurité des aliments. L'Italie, quant à elle, dispose d'une loi qui protège son système agricole traditionnel et le principal syndicat est opposé aux OGM. Un groupe de travail composé des régions réfléchit néanmoins à des règles de coexistence.

L'isolement des cultures génétiquement modifiées implique un changement radical des pratiques, allant au-delà du respect de distances, dans un secteur où silos et machines sont souvent communs. Pour Greenpeace, "c'est ingérable". L'association s'inquiète, à terme, de l'émergence de régions spécialisées, comme en Espagne, où les agriculteurs seront mis devant le fait accompli.

Même si la production de maïs OGM reste très faible en France rapportée aux surfaces de maïs traditionnel - 0,18 % contre 13,6 % en Espagne -, les yeux sont rivés sur elle. "Si le gouvernement prenait le cap de la sauvegarde de l'agriculture traditionnelle, cela pourrait avoir un effet d'entraînement majeur, notamment sur les nouveaux Etats membres", juge M. Apoteker.

Avec une production faible mais croissante, l'UE pourra-t-elle continuer à laisser coexister des règles aussi diverses ? La Commissaire européenne à l'agriculture, Mariann Fischer-Boel a évoqué en mai la création d'un "bureau européen de la coexistence", chargé de trouver un consensus.



Laetitia Clavreul

canardos
 
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