a écrit :Par Jean Etienne, Futura-Sciences
Bien qu'assortie de sévères contraintes, l'autorisation par le gouvernement britannique, prise le 17 mai dernier d'autoriser la création in vitro d'embryons de chimères humain-animal suscite de vives réactions.
Le but de cette culture est de répondre à la demande des groupes de recherche impliqués dans l'étude des cellules souches. En pratique, ces embryons ne doivent pas être conservés en vie bien longtemps, et les scientifiques s'accommodent très bien de la limite de 14 jours qui leur a été imposée. Ce délai se justifie par la position adoptée par de nombreux chercheurs, qui estiment qu'avant l'âge de 14 jours, l'embryon n'est pas encore un être humain à l'état d'ébauche et que toutes les manipulations de cette petite boule de cellules sont sans conséquences. En corollaire, il est bien entendu exclu de les implanter dans un utérus.
Les chimères ainsi produites, sur lesquelles des expériences ont déjà été effectuées notamment en Chine et aux Etats-Unis, sont obtenues par l'implantation du noyau d'une cellule humaine à l'intérieur d'un ovocyte animal. Ces essais s'inscrivent dans le cadre de la recherche sur la mise au point de méthodes de production de cellules souches à des fins thérapeutiques, notamment.
Mais la décision du gouvernement surprend, car elle semble court-circuiter une initiative de la HFEA (Human Fertilization and Embryology Authority) qui constitue, de l'avis de tous les spécialistes, un parfait modèle de contrôle et de régulation de ce secteur, et qui avait annoncé son intention de procéder à une vaste consultation populaire en automne prochain avant de se prononcer sur le sujet. Sa directrice générale, Angela McNab, déclare que "ce serait une erreur de porter un jugement immédiat sur ce problème compliqué et controversé avant d'avoir suffisamment d'éléments".
En France, le professeur Axel Kahn, généticien à l'Inserm réagit en ces termes: "La décision anglaise était attendue depuis longtemps, précédée par la recommandation du Comité de bioéthique de Nuffield. Même si la loi anglaise interdisait la recherche sur l'embryon dans d'autres buts que celui d'améliorer la fertilité, elle était, depuis quelques années, tolérée dans certains laboratoires ayant d'autres visées. Dans les autres pays européens, on n'envisage pas encore le clonage, thérapeutique ou reproductif. Mais, si les recherches effectuées chez les animaux ou, ailleurs, chez l'homme sont couronnées de succès, les législateurs seront face à une tension éthique entre l'idée qu'ils se font de l'embryon et les progrès thérapeutiques promis. Il sera important d'avoir un vrai débat démocratique et de ne pas nier les difficultés de tous ordres auxquels on sera confronté."
Le Vatican, quant à lui, s'est fait entendre par la voix de Mgr Elio Sgreccia, président de l'Académie pontificale pour la Vie. Affirmant que cette décision va à l'encontre du droit et de la justice, il rappelle que la création d'un hybride homme-animal "représente une frontière violée dans le domaine de la nature, la plus grave, ce qui entraîne une condamnation morale totale". Il émet aussi la crainte que l'on puisse, ultérieurement, créer des monstruosités à travers ces fécondations.
Cellules souches embryonnaires humaines. Source: University of Wisconsin-Madison.
qu'en pensez vous?