a écrit :Vous connaissez la dernière, le Prozac c'est nul
Voilà donc que le Prozac, et autres anti-dépresseurs dit de nouvelles générations, changent en 24 heures de statut. Ce n'est plus un effet de balancier, mais un retour de bâton. Hier, présenté comme la pillule miracle contre la déprime, voilà qu'aujourd'hui on met en avant son ...inefficacité, selon le quotidien anglais The Independent. En somme, bon à jeter
Ainsi, une étude de l'université anglaise de Hull (nord) a mis en doute l'efficacité de ces antidépresseurs comme le Prozac et le Deroxat, estimant que ces médicaments n'avaient guère plus d'effets que des placebos. "La différence d'amélioration entre les patients prenant des placebos et ceux prenant des antidépresseurs n'est pas très importante. Cela signifie que les personnes souffrant de dépression peuvent aller mieux sans traitement chimique", a expliqué ainsi le professeur Irving Kirsch, du département de psychologie de l'université de Hull. Selon l'étude publiée dans la revue spécialisée PLoS-médecine (bibliothèque publique de science), les ISRS n'ont pas plus d'effet que des placebos pour les dépressions légères et pour la plupart des graves dépressions. Pour les dépressions très graves, la différence est davantage liée à une moindre réaction des patients au placebo qu'à une réaction positive aux antidépresseurs, selon l'étude. "Etant donné ces résultats, il semble qu'il y ait peu de justifications à la prescription de traitements antidépresseurs à part pour les personnes souffrant de très grave dépression, sauf si les traitements alternatifs n'ont pas permis d'amélioration".
Comme on pouvait s'y attendre, aussitôt, un porte-parole d'Eli Lilly, fabricant du Prozac, a affirmé qu'une "expérimentation médicale et scientifique approfondie a démontré que la fluoxetine est un antidépresseur efficace".De son côté, un porte-parole de la firme GlaxoSmithKline, qui produit le Deroxat, a estimé que les auteurs de l'étude n'avaient "pas reconnu les effets très positifs que ces traitements ont apportés aux malades et à leurs familles pour affronter la dépression et leurs conclusions sont en désaccord avec ce qui a été constaté au niveau clinique".
Laissant de coté l'éventuelle pertinence de l'étude anglaise. Car sur ce point, que dire? Pourquoi courir, en effet, aussi vite dans un sens plutôt que dans un autre? On attend, en tout cas, avec intérêt l'avis des spécialistes de l'Agence de sécurité sanitaire des produits de santé qui, jusqu'à présent, dans tous ses avis, ont noté un effet thérapeutique réel de ces nouvelles molécules. La plupart des psychiatres interrogés confirmant ce fait. Mais, aujourd'hui, en France comme dans un grand nombre de pays occidentaux, le problème de santé publique est ailleurs. Il est dans une prescription mano largo de ces médicaments. Avec un élargissement sans cesse des indications. Avec des campagnes de publicité agressives, avec des suggestions fortes pour laisser croire que ces molécules pourraient servir aussi en ...prévention. On en prescrit trop et mal. Et c'est bien là le probléme. Faut-il rappeler, d'ailleurs, que ces anti dépresseurs sont prescrits, en très grande majorité, par des généralistes et non par des psychiatres?
Un médicament, -qui est toujours un peu plus compliqué que la simple substance active qui la compose-, n'a jamais fait le bonheur. Son rejet, non plus.
Eric Favereau
a écrit :Antidépresseurs: pour quelques dollars de plus!
Revenons sur l'étude anglaise concernant l'efficacité des antidépresseurs qu'évoque Eric Favereau dans sa note. L'étude a été publiée dans "Plos medicine" (Vol 5 N°2) revue non référencée dans la base bibliographique médicale et scientifique la plus consultée (Pubmed).
Cette meta analyse (analyse combinée des essais cliniques disponibles répondant à une même question scientifique) a été réalisée par un anglais I Kirsh et des médecins américains. Ils ont analysé les données de 35 essais cliniques portant sur 5.133 patients, publiées et non publiées, qui avaient été soumises à la Food and Drug Administration (FDA) pour quatre antidépresseurs: deux antidépresseurs de la classe des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (ISRS), la fluoxétine (princeps: Prozac*, Lilly) et la paroxétine (princeps: Deroxat*, GlaxoSmithKline); deux antidépresseurs à action double (dont l'inhibition de recapture de la sérotonine), la venlafaxine (princeps: Effexor*, Wyeth) et la néfazodone (princeps: Serzone*, Bristol-Myers Squibb).
En France la haute autorité de santé (HAS) a classé les méthodes d'études scientifiques des travaux médicaux. Selon ce classement il convient de retenir le faible niveau ou au maximum la présomption de preuve scientifique des conclusions de ce type de travail.
Interrogée, une spécialiste des études cliniques indique: "La méta-analyse peut permettre d'obtenir des preuves fiables lorsque les essais cliniques publiés (ou non) sur le sujet ont été discordants. Dans le cas précis de la méta-analyse publiée, aucun des essais cliniques ne montrait de supériorité du placebo par rapport à l'antidépresseur. Les essais montraient tous une différence du critère de jugement (significative ou non en fonction de la puissance de l'étude) en faveur de l'antidépresseur.
Par ailleurs, les auteurs proposent dans cette étude un modèle statistique compliqué pour analyser l'efficacité de l'antidépresseur en fonction du score de gravité initial et concluent que les antidépresseurs ne seraient efficaces que chez les "plus déprimés". Ce type de manipulation statistique a posteriori à partir d'essais cliniques où les patients sont en plus hétérogènes doit être pris avec la plus grande prudence.
Enfin, les auteurs soulignent avec justesse la différence entre l'obtention d'un résultat statistiquement significatif dans une étude et le seuil de significativité clinique. Le critère de jugement de l'étude (défini lors de la mise en place du protocole) doit avoir une pertinence clinique et la différence attendue doit être significative sur le plan clinique. Mais aucune manipulation statistique n'autorise a posteriori à retravailler les conclusions d'études en modifiant ce critère de jugement, même si sa pertinence peut être remise en question".
Cerise sur le gateau pour ajouter au débat, comme la loi oblige l'auteur d'un article à y publier les conflits d'intérêts éventuels, on apprend que l'auteur reçoit des "grants" de Pfizer qui commercialise le Zoloft, un autre antidépresseur de la même classe (inhibiteur de recapture de la sérotonine) qui comme par hasard n'est pas inclus dans la méta-analyse....
François Aubart
NB: N'étant pas spécialiste en pharmacie, je n'ai rien à redire sur le fond de ce message. Il semblerait cependant que contrairement à ce qu'affirme François Aubart, la revue "Plos medicine" est bel et bien référencée dans Pubmed. Ce n'est donc pas un journal si confidentiel... Par ailleurs les chercheurs reçoivent très souvent des "grants" de telle ou telle entreprise et cela ne fausse pas forcément leur recherche, comme le suggère pas très intelligemment le dernier paragraphe. Ce n'est pas à exclure, mais c'est un peu anecdotique...