Que dire sur le port d'arme

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par Gaby » 06 Avr 2008, 11:40

(Zelda @ dimanche 6 avril 2008 à 12:21 a écrit : Et je ne dis qu'une chose : ceux qui pensent que c'est intrinsèquement mauvais que la vente d'armes soit (assez) libre aux Etats-Unis se trompent. Dans d'autres périodes, comme tu le suggères, ça pourrait s'avérer un atout relatif. Nous ne sommes pas pacifistes, ni bêlants malgré ce que suggère ma signature.  :-P

Je crois avoir bien compris, et je pense quand même que c'est dogmatique, dans la veine des semi-vérités de la NRA, "c'est l'homme qui tire sur la gâchette". Tu poses la question comme si nous étions en juillet 1917 en Russie, en aout 1973 au Chili, en mars 1871 en France, etc (l'avantage hypothétique).

Si en France ce droit venait à être appliqué aujourd'hui, cela signifierait le développement de la violence quotidienne. Et quel progrès pour nos luttes ?
Les frappes dont tu parles n'ont pas de flingue en France. Tu peux te faire agresser avec une arme blanche, mais les cas du flingue sur la tempe sont beaucoup plus rares. Tiens, on pouvait lire récemment dans la presse des copains américains :
http://www.the-spark.net/np819202.html
C'est heureux qu'on ne le lise pas dans LO.

Tu remarqueras d'ailleurs que pour les massacres type Columbine, les médias ont toujours cherché à trouver une autre raison prétendument plus profonde, comme les jeux vidéos ou que-sais-je encore.

Pour employer le même genre de rhétorique que tu le fais au sujet des malfrats et de leur facilité à se procurer des armes à feu, je te dirais que les armes se trouvent encore plus facilement en période révolutionnaire.

D'ailleurs il me semble bien que le vrai héritage de la révolution américaine n'est pas le droit total de porter des armes à feu... ce n'est certainement pas le libéralisme en vigueur aux Etats-Unis sur le problème...

Je ne vois pas d'autre façon de formuler aujourd'hui une perspective politique que de dire qu'il faut un contrôle très strict de la circulation des armes à feu par la population, notamment sur la police.

En complément, interdire la vente aux particuliers aujourd'hui ne me choque pas, en raison du simple examen de ses conséquences immédiates. L'inverse, de façon complètement déconnectée de notre contexte de paix sociale et de misère quotidienne, si.
Gaby
 
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Message par com_71 » 06 Avr 2008, 13:12

La discussion promettant d'être intéressante, pour éviter le hors-sujet, je modifie le titre du fil.

Ben-hur est mort. ----> Que dire sur le port d'arme
(suite à la mort de Charlton Heston)
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par com_71 » 06 Avr 2008, 13:31

(Gaby @ dimanche 6 avril 2008 à 12:40 a écrit : En complément, interdire la vente aux particuliers aujourd'hui ne me choque pas, en raison du simple examen de ses conséquences immédiates. L'inverse, de façon complètement déconnectée de notre contexte de paix sociale et de misère quotidienne, si.
La misère quotidienne et la paix sociale, ça fait deux.

La misère culturelle et morale, ça peut signifier des bandes racistes agressant des étrangers, pauvres de préférence (ce n'est qu'un exemple). Dans de telles situations, il n'y a certainement pas que des problèmes d'armement à soulever.
Mais des révolutionnaires ne peuvent pas, ne doivent pas faire de la propagande contre les armes ou l'armement.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par yannalan » 06 Avr 2008, 14:05

En Corse, tout le monde en a des armes, et depuis toujours.
Je n'ai pas de stats sur la délinquance (hors politique), je n'ai aps l'impression qu'elle soit pire qu'ailleurs. Pour ce qui est des délinquants, ils n'ont actuellement en France, aucun problème à se procurer des armes, la chute des pays de l'Est et la guerre en Yougo ont mis ce qu'il faut sur le Marché....
yannalan
 
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Message par Gaby » 06 Avr 2008, 14:12

(com_71 @ dimanche 6 avril 2008 à 14:31 a écrit :
(Gaby @ dimanche 6 avril 2008 à 12:40 a écrit : En complément, interdire la vente aux particuliers aujourd'hui ne me choque pas, en raison du simple examen de ses conséquences immédiates. L'inverse, de façon complètement déconnectée de notre contexte de paix sociale et de misère quotidienne, si.

La misère quotidienne et la paix sociale, ça fait deux.
Ca dépend quand. Aujourd'hui c'est de l'ordre du constat. Les luttes de classe américaines ne sont pas les mêmes qu'en 1934.

Est-ce que je dis que jamais il ne faudrait recourir à la violence ? Non.

Les révolutionnaires ne défendent pas le port d'arme dans l'absolu, pour tous, au contraire même. Nous devons défendre le droit au recours à la violence dans le cadre d'une lutte émancipatrice par la classe révolutionnaire. Procéder autrement, c'est plus ou moins directement désigner comme issue le terrorisme individuel.

Quand Trotsky écrit dans l'entre deux guerres qu'il ne faut pas se laisser abuser par un pacifisme hypocrite ou niais, son inquiétude porte sur les risques de l'angélisme du mouvement ouvrier des années 30 alors que le fascisme menace de mort toute organisation. Aujourd'hui la question ne se pose pas de la même façon. Non pas que la capitalisme ait surmonté ses contradictions ou que la guerre n'est plus possible, simplement que le port d'arme libre aujourd'hui signifie avant toute chose des problèmes assez similaires à la libre circulation de drogues. S'en foutre parce qu'un jour révolutionnaire, il sera plus pratique de trouver une pétoire rouillée dans son tiroir pour s'attaquer à la bombe atomique, c'est écarter sans aucune considération les problèmes les plus urgents pour la population pauvre.

Même la révolution américaine n'était pas totalement libérale sur cette question à l'époque de la guerre d'indépendance. Au fond la formulation du second amendement, c'est la constitution d'une... armée et d'une police, à partir des hommes libres (comme sous Henri II au XIIème s.) comme une nécessité pour l'intérêt du "peuple". C'est le service militaire, la constitution de forces de l'ordre.

Tu dis "des révolutionnaires ne peuvent pas, ne doivent pas faire de la propagande contre les armes ou l'armement."... déjà quand il s'agit de simplement faire la critique de la barbarie de notre temps, c'est un argument que j'ai souvent entendu de militants. Quand l'impérialisme engage une course à l'armement qui peut signifier des milliers de fois l'explosion de notre planète, je conteste franchement l'idée qu'on ne peut pas faire "de la propagande contre les armes". On ne se prive pas quand les flics abusent de leur pouvoir ; quant aux assassins à la petite semaine, on fait quoi, un passe-droit, un silence idéalisant la réalité de la vie des prolos ? Non, il faut bien sûr défendre l'idée d'un contrôle draconien des armes, pas par l'Etat, s'opposer frontalement à leur commercialisation.

Alors il faut un peu plus contextualiser, et certainement pas rejeter d'un revers de main les aspirations légitimes du prolétariat américain qui ne peut en l'état résoudre le problème de la violence dans ses quartiers (on parle ici de dizaines de milliers de morts) sans imposer son contrôle sur les armes à feu de l'Etat (contre l'exploitation et les bavures) comme de ses membres (contre les assassinats motivés par les tout petits profits...).
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Message par Leonid » 06 Avr 2008, 16:09

En Suisse, l'immense majorité des hommes majeurs de nationalité ont une arme d'assaut qu'ils entretiennent chez eux.

Cela ne fait pas de la Suisse un pays ou les meurtres par armes à feu se comptent par dizaines de milliers.

Ce qui alimente la violence physique dans les classes populaires américaines, ce n'est pas la vente libre des armes, c'est la violence sociale imposée par la bourgeoisie.
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Message par Gaby » 06 Avr 2008, 16:38

(AxelPersson @ dimanche 6 avril 2008 à 17:09 a écrit : En Suisse, l'immense majorité des hommes majeurs de nationalité ont une arme d'assaut qu'ils entretiennent chez eux.

Cela ne fait pas de la Suisse un pays ou les meurtres par armes à feu se comptent par dizaines de milliers.

Ce qui alimente la violence physique dans les classes populaires américaines, ce n'est pas la vente libre des armes, c'est la violence sociale imposée par la bourgeoisie.
Un petit paradis ? Heureusement que la Suisse est libérée de la "violence sociale" (sic).
Pour avoir jeté un oeil rapidement, les morts s'y comptent en centaines par année, pour un pays de 7 millions d'habitants... Et comme ailleurs, ce sont les tenants de la "liberté individuelle" qui sont les grands champions de cette cause...
Gaby
 
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Message par com_71 » 06 Avr 2008, 17:06

(Gaby @ dimanche 6 avril 2008 à 17:38 a écrit :
Un petit paradis ? Heureusement que la Suisse est libérée de la "violence sociale" (sic).
Pour avoir jeté un oeil rapidement, les morts s'y comptent en centaines par année, pour un pays de 7 millions d'habitants... Et comme ailleurs, ce sont les tenants de la "liberté individuelle" qui sont les grands champions de cette cause...

Je ne comprends pas bien ce que tu défends dans cette discussion.

De quelle cause parles-tu ? Et de quelle liberté individuelle ?

Tu es pour des lois restreignant le port d'armes ? Maintenant ? Et si l'armement des opprimés devient ici ou là à l'ordre du jour, il tomberont sous le coup de cette loi ?

Tu es pour que le port d'armes soit sous contrôle de la population ? Mais comment s'exercera ce contrôle s'il concerne des hommes armés. En fait, il implique lui-même un certain armement de la population.

L'agitation sur ces sujets est une question de circonstance, mais sans armement des travailleurs (ce qui n'a rien d'une liberté individuelle) il n'y aura pas de socialisme. Tout argument allant dans le sens du pacifisme, d'un refus "moral" de l'armement et de l'usage de la violence par les opprimés, ne va pas, en principe, dans le sens du progrès social.

Tu cites les camarades américains, mais je crois que tu serais bien en peine de trouver, sous leur plume, une demande de restriction du port d'armes. Ce qui n'est bien sûr pas équivalent à applaudir ceux qui, actuellement, tirent à tort et à travers, ou en service commandé.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par Gaby » 06 Avr 2008, 17:37

(com_71 @ dimanche 6 avril 2008 à 18:06 a écrit : Tu cites les camarades américains, mais je crois que tu serais bien en peine de trouver, sous leur plume, une demande de restriction du port d'armes. Ce qui n'est bien sur pas équivalent à applaudir ceux qui, actuellement, tirent à tort et à travers, ou en service commandé.

"Applaudir" encore heureux que non, mais ignorer le problème ? Sans apporter de caution, au moins un passe-droit.

D'une ce n'était pas mon but de les citer de cette façon, simplement témoigner de ce qu'est le quotidien des travailleurs américains. Quelle que soit la position de camarades, de fait voilà leur réalité, un collègue mort par balle. Vu d'ici c'est très facile de s'asseoir sur ces drames, à coup de smileys rigolards. Moi ça me choque, ce genre d'attitude légère ne survit pas à la mort d'un proche ou est complètement incompréhensible quand on s'adresse aux victimes. Alors au moins, ne pas raconter bien confortablement depuis sa connexion adsl que l'on méprise les "imbéciles bêlants"... En 2008 aux USA, les gens dont on parle n'ont pas grand chose à voir avec ceux qui ont refusé d'armer les Chiliens face à Pinochet. Ne pas faire la distinction, c'est du dogmatisme désincarné.

De deux faire le choix de ne pas parler du problème de la libre circulation des armes à feu, c'est effectivement une orientation politique qui à mon avis se raconte des histoires, fait le choix délibéré d'occulter de graves problèmes immédiats pour les travailleurs. Ce n'est pas une discussion morale sur l'emploi de la violence, ou sur une forme d'interdiction éternelle, tu serais bien en peine de trouver ce genre de considérations plus haut dans la discussion. Je ne parle pas ici de principes généraux sur le pacifisme, simplement des modalités de la restriction de la circulation des armes à feu et par qui. Tu t'y refuses parce que c'est de l'anti-armement bêta.

Si tu étais tout à fait cohérent avec ta position, tu défendrais le droit immédiat et complet du port d'armes dans la situation française, comme garantie démocratique indispensable et urgente. Personne ne le fait, c'est que les enjeux de l'armement dépassent largement la finalité de la violence des révolutions, et que les chemins sont sans doute plus complexes que ça.

Tu soulignes une contradiction :
a écrit :Tu es pour que le port d'armes soit sous contrôle de la population ? Mais comment s'exercera ce contrôle s'il concerne des hommes armés. En fait, il implique lui-même un certain armement de la population.

Certes, mais je crois que l'armement de la population, ce n'est vraiment pas la vente libre aux particuliers. Le contrôle peut être exercé par des organisations politiques. La nuance peut paraitre superficielle, mais au fond c'est la différence entre la liberté de constitution de milices de mercenaires (au service de la police), et une véritable organisation des travailleurs pour la paix des quartiers.

Je ne sais pas si je vais intervenir beaucoup plus faute de temps, surtout si tu me demandes plus que quelques éléments de discussion une résolution exhaustive. Mais en général je suis assez faible avec les forums.
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Message par Leonid » 06 Avr 2008, 18:47

a écrit :Un petit paradis ? Heureusement que la Suisse est libérée de la "violence sociale" (sic).
Pour avoir jeté un oeil rapidement, les morts s'y comptent en centaines par année, pour un pays de 7 millions d'habitants... Et comme ailleurs, ce sont les tenants de la "liberté individuelle" qui sont les grands champions de cette cause...


Selon le "European Sourcebook of Crime and Criminal Justice Statistics", la Suisse détient la plus haute densité d'armes à feu en Europe et simultanément le plus bas taux d'homicides, en diminution de surcroît: on compte 10 homicides par million d'habitants et par an, tous moyens confondus.

Bien évidemment, la Suisse n'est pas libérée de violence sociale, de misère, de bas salaires, de chômage et de précarité. Sans oublier le racisme très pregnant.

Les grèves récentes, notamment chez les cheminots, viennent le rappeller.

Mais la situation n'est pas la même que dans les quartiers populaires ou le taux d'homicide est le plus élevé aux Etats-Unis.
Leonid
 
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