a écrit :Les Echos - 17 nov. 2009
Le FMI favorable à une nouvelle devise mondiale
PEKIN (Reuters) - Si le monde veut bénéficier d'une plus grande stabilité monétaire, il ne peut plus dépendre d'une seule monnaie de réserve internationale, comme c'est le cas depuis l'abandon de l'étalon-or, déclare le directeur général du FMI.
Dominique Strauss-Kahn a confirmé que cette nouvelle monnaie de réserve pourrait être basée sur le système des droits de tirage spéciaux (DTS), l'unité de compte utilisée par le Fond monétaire international (FMI).
"Il s'agira vraisemblablement d'un panier. Dans un monde globalisé, il n'y plus de place pour une solution nationale", a-t-il déclaré lors d'un forum.
Lors d'une conférence organisée un peu plus tard, Dominique Strauss-Kahn a également souligné que Pékin avait besoin d'un yuan plus fort dans le cadre d'une série de mesures visant à stabiliser l'économie chinoise, un message martelé à plusieurs reprises par le directeur général du FMI lors de sa visite en Chine
Prié de dire, lors d'une conférence de presse, quand la Chine devait commencer à laisser s'apprécier sa monnaie, également connue sous le nom renminbi (RMB), il a répondu : "Le plus tôt sera le mieux".
"Parce que cela serait cohérent avec la nouvelle politique économique en Chine. Cela prendra du temps car il ne s'agit pas là de quelque chose que l'on peut modifier d'un jour à l'autre", a poursuivi le directeur général du FMI.
La Chine a maintenu un taux de change de 6,83 yuans pour un dollar depuis juillet 2008 après une hausse de 21% de la devise chinoise par rapport au billet vert sur les trois années précédentes.
"Au FMI, nous sommes convaincus que le RMB est sous-évalué et qu'il est dans l'intérêt, non seulement de l'économie mondiale, mais aussi de l'économie chinoise de procéder à une réévaluation de la devise", a déclaré Dominique Strauss-Kahn.
Il a souligné qu'une monnaie sous-évaluée entraînait des distorsions économiques, ce qui peut avoir certains avantages pour le pays concerné mais aussi représenter des coûts pour des secteurs d'activité moins liés à l'exportation.
"La Chine possède ainsi un avantage commercial mais elle souffre également de prix qui sont faux, susceptibles d'aboutir à de mauvaises décisions en matière d'investissements à long terme", a poursuivi Dominique Strauss-Kahn.
"Il est temps que la Chine, après avoir tiré beaucoup d'avantages d'une monnaie sous-évaluée, se fixe comme objectif une stabilité à long terme. Celle-ci ne peut être atteinte qu'en éliminant les distorsions."
PAS DE TEMPS À PERDRE
Dominique Strauss-Kahn a ainsi joint sa voix à celle du président américain Barack Obama, qui a encouragé son homologue chinois Hu Jintao à favoriser l'appréciation du yuan, à l'occasion d'un entretien à Pékin entre les deux hommes centré sur les relations commerciales et les taux de changes.
Hu Jintao, de son côté, n'a pas évoqué le niveau de la monnaie chinoise, sujet de friction entre les deux pays, lors des déclarations faites après la réunion, sans possibilité de questions par les journalistes.
Le président chinois a en revanche salué le climat "franc, constructif et fructueux" des discussions qu'il a eues avec Barack Obama à l'occasion du premier déplacement du président américain en Chine.
"Je suis heureux de noter l'engagement chinois lors de précédentes déclarations à oeuvrer à terme pour des taux de change plus orientés vers le marché", a déclaré le président américain en évoquant les monnaies.
Dominique Straus-Kahn s'est dit inquiet de voir s'affaiblir la volonté politique de réformer le système monétaire international dans l'hypothèse où, d'ici un an, les signes les plus visibles de la crise économique auront disparu.
Il a estimé que l'élan de coopération était quelque peu retombé et ce seulement six mois après le sommet du G20 à Londres, où les plus grands pays du monde s'étaient mis d'accord sur la nécessité de mettre en place des changements destinés à assurer un ordre financier international plus stable.
Un ancien dirigeant du FMI, Michel Camdessus, a estimé qu'il ne fallait pas rater l'occasion offerte de réformer le système monétaire mondial.
"Il y a une fenêtre d'opportunités favorable. Elle ne va pas rester ouverte indéfiniment", a-t-il déclaré.
Michel Camdessus a apporté son soutien à l'idée émise au début du printemps par le gouverneur de la banque centrale chinoise proposant de remplacer le dollar par les DTS comme monnaie de réserve "supra-nationale".
Le corollaire de ce renforcement du rôle des DTS serait des changements de gouvernance au FMI permettant de faire pencher encore davantage la balance des pouvoirs vers les pays émergents, a poursuivi Michel Camdessus.
Dans cette optique, le panier composant les DTS devrait être modifié et inclure le yuan, voire la roupie indienne et le real brésilienne, a encore déclaré l'ancien directeur général du FMI.
Alan Wheatley et Simon Rabinovitch
La proposition de D. Strauss-Kahn est désarmante de naïveté. Elle revient à demander à ceux qui se font la guerre de se battre à armes égales et d'être fair-play. Les dignitaires de Pekin doivent être morts de rire... Si le directeur du FMI en vient aujourd'hui à faire ce genre de proposition, c'est que la machine est bien plus mauvais état qu'on ne veut bien le dire.
Depuis les années 90, le système financier se ment à lui-même. Tout ce qu'il affiche est faux et l'est chaque jour davantage.
La plupart des économistes sérieux reconnaissent par exemple que l'indice actuel du Dow Jones qui avoisinne les 10 000 points devrait en réalité se situer 3 à 4 000 points plus bas. Le krach qui a fait plonger les bourses l'année dernière n'a pas permis de vidanger complètement les circuits, ce qui aurait permis de repartir sur des bases saines. Or on constaté déjà quelques mois seulement après la grosse alerte, qu'une bulle spéculative est en train de se former qui va faire très mal quand elle éclatera.
Le taux des monnaies est lui aussi totalement décalé par rapport à ce qu'il devrait être. Et celui qui parle encore de réformer le système monétaire international croit vraiment au Père Noël...
L'administration américaine a besoin d'un dollar bas pour financer ses dépenses de guerre, soutenir son marché intérieur, doper sa croissance, satisfaire le yankee moyen pour qui ne pas consommer, c'est ne pas vivre.
De son côté, la Chine marque l'Amérique à la culotte en alignant le yuan sur le dollar. Elle la tient aussi par les couilles après lui avoir racheté pour plus de 800 milliards de dollars de bons du Trésor... Les chinois en sont réduits à épargner faute de n'avoir les moyens de consommer ce qu'ils produisent, et leurs dirigeants font ce qu'il faut pour faire durer cette situation le plus longtemps possible tant qe cela profitera à la croissance économique du pays.
Pour l'instant USA et Chine sont partenaires puisqu'ils jouent la même partie. Partenaires, oui, mais surtout adversaires puisqu'ils s'opposent avec leurs armes spécifiques.
Pour l'instant, l'un consomme, emprunte et s'endette, l'autre épargne, prête et engrange.
Ce round d'abservation durera jusqu'à ce que Pekin décide de récolter les fruits de sa politique. Il désindexera alors le yuan du dollar et tentera de faire imposer sa monnaie dans les échanges internationaux.
Quand ce jour viendra, il sera trop tard pour se mettre aux abris... Strauss-Kahn le sait bien et sa dernière intervention résume bien son impuissance à éviter l'inévitable.
En prenant place dans la limousine qui le ramenait chez lui, il a dû laisser échapper un "pff..."