Informations Ouvrières N° 108 semaine du 29 au 04Août 2010
L'EDITO PAR DANIEL GLUCKSTEIN
“Bataille dans l’hémicycle” ?
Jacques Attali fut naguère conseiller de François Mitterrand.
Nommé par Sarkozy, il préside aujourd’hui la « commission pour la libération de la croissance française ».
A ce titre, il présente un rapport, dont, selon ses propres termes, l’élément clé est « la maîtrise des finances publiques ».
Et de préciser : « Nous voulons définir le programme commun minimum qui devrait être appliqué, quoi qu’il arrive, sans interruption pendant les dix ans qui viennent et quelle que soit la couleur politique des présidents de la République. »
Au coeur de ce programme: la remise en cause de la protection sociale et des garanties collectives de la classe ouvrière.
Au compte de qui, ce consensus de dix ans ainsi préconisé ?
Le jour même où Attali tenait ces propos (Les Echos, 23 juillet), on apprenait que les banques françaises avaient passé avec succès les « stress-tests ».
Ouf !
Les travailleurs sont rassurés !
Il est vrai qu’avec des centaines de milliards d’euros de fonds publics injectés dans les trésoreries des banques, c’était la moindre des choses.
Oui,mais attention !
Malgré cet état florissant, les banques françaises connaissent des difficultés sur les marchés boursiers.
Explication d’un spécialiste cité par l’agence Reuters : « Il y a une défiance du marché envers l’économie française, qui pèse sur les banques françaises (…), les investisseurs trouvent que les réformes sont trop lentes en France. »
Nous y voilà.
La remise en cause des retraites ouvrières n’a donc rien à voir ni avec la démographie ni avec quoi que ce soit d’autre.
Les « marchés » s’inquiètent de la résistance ouvrière qui menace la marche aux contre-réformes.
Ils exigent des garanties.
Au même moment, à Strasbourg (lire page 16), General Motors prétend implanter chez nous des méthodes antisyndicales et anti-ouvrières directement importées des Etats-Unis.
Et le consensus dans tout cela ?
A Strasbourg, les responsables du Parti socialiste se félicitent de ce que le coup de force de General Motors semble aboutir.
Au même moment, à l’Assemblée nationale députés du PS et du PCF font assaut d’amendements et se prononcent, qui pour faire travailler les salariés jusqu’à 64 ans, qui pour l’allongement de la durée de cotisation...
Le gouvernement leur répond en intégrant certains de ces amendements.
Cela donne un avant-goût de ce que L’Humanité (21 juillet) appelle « la bataille dans l’hémicycle qui débutera le 6 septembre ».
Bataille dans l’hémicycle !
Vaste pantomime, dont le résultat est donné d’avance…
Il n’est qu’une bataille qui fera reculer le gouvernement.
Elle se déroule sur le terrain de la lutte de classe, exigeant la réalisation de l’unité sur un mot d’ordre clair: retrait de la contre-réforme.
Ce qui suppose de ne pas se plier aux diktats de Washington, du FMI, de l’Union européenne, en un mot : de la classe des exploiteurs, capitalistes, banquiers et spéculateurs.
Non, M.Attali.
Ni pour dix ans, ni pour dix mois, ni pour dix jours…
La démocratie ne s’accommode d’aucun « programme commun » visant, au compte des capitalistes, à étrangler la classe ouvrière et enchaîner ses organisations.
La démocratie exige la rupture du consensus.
Et sur la base de cette rupture, les conditions peuvent et doivent se réunir pour l’unité de la classe ouvrière et de ses organisations infligeant à ce gouvernement le recul qu’appelle sa contre-réforme.
Daniel Gluckstein
Secrétaire national du POI