A quoi mène l'apolitisme des "indignés"

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par redspirit » 05 Nov 2011, 12:01

[quote=" (Sinoue @ mardi 1 novembre 2011 à 23:40"]
Tu le signales toi-même: "jusqu'à 2008" le libéralisme n'a jamais eu autant d'adeptes. On constate trois phases du développement du capitalisme depuis l'après-guerre, qu'il serait d'ailleurs intéressant de comparer avec les phases d'avant la première guerre mondiale; d'abord une collaboration étroite entre l'état et les capitaux pour conquérir les marchés, ensuite une déréglementation des marchés afin d'accélérer et faire fructifier les échanges, et enfin une intervention massive des états afin de combler la baisse tendancielle du taux de profit.
L'intervention des Etats depuis 2008 ne me semble pas s'inscrire dans une logique des restauration des taux de profit, mais plus de sauvetage du système bancaire européen.
Autrement dit, s'inscrit comme une intervention nécessaire mais temporaire dans la logique des marchés. Aujourd'hui, la conception de son rôle économique peut se réduire à deux sphères pour les tenants du libéralisme :
1. Permettre aux marchés de fonctionner de manière optimale (en dehors de quelques libertariens, tout le monde s'accorde sur le fait que l'état précède le marché)
2. Appliquer le programme du marché là où le marché n'est pas en mesure de le faire ( marché des biens publics, le rôle des banques centrales comme prêteur en dernier ressort...)
La période actuelle doit clairement être pour eux, une parenthèse, qui se refermera dès lors que la confiance aura été retrouvée sur les marchés.

Par ailleurs, sans être convaincu qu'une discussion sur la baisse tendancielle du taux de profit ait un grand intérêt par rapport au sujet, je tenais tout de même à émettre deux réserves par rapport à des analyses de cycle uniquement focalisé sur le taux de profit :
1. Il n'y a pas de taux uniforme de profit dans l'économie aujourd'hui. La conception de Marx d'un taux de profit unique repose sur l'idée selon laquelle la concurrence entre capitalistes via les mouvements de capitaux d'une branche à l'autre en fonction des opportunités de sur-profit qui y apparaissent fait s'ajuster les taux de profit autour d'un niveau commun à l'ensemble de l'économie. Néanmoins, cette vision suppose que les marchés soient parfaitement concurrentiels. Ce n'est, me semble-t-il, pas ce qui domine aujourd'hui. Les structures de concurrence traduisent plus des situations de concurrence monopolistique ou d'oligopoles où l'existence de nombreuses barrières à l'entrée sur les marchés empêchent le taux de profit de se fixer à un taux uniforme.
2. Les évolutions du taux de profit ne reflète pas symétriquement les évolutions du partage de la richesse produite. Alors que le taux de profit "moyen" connaît une trajectoire descendante depuis l'an 2000 en France, il en va de même pour la part des salaires dans la valeur ajoutée (même si la baisse est moins marquée). Autrement dit, le taux de profit peut diminuer et la part des profits augmenter de manière simultanée.
redspirit
 
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Message par Sinoue » 07 Nov 2011, 23:55

Oulàlà!! Tu as des connaissances économiques qui ne me permettent pas de rivaliser, il va falloir m'aider à définir des termes.

La premiere phrase que tu dis est juste, mais j'ai tendance a penser que tout est lié. Les états interviennent pour sauver les banques ont trop spéculé sur des fonds "toxiques" (c'est a dire déconnectés d'une valeur négociable sur le marché productif) ou sur des dettes d'état irrécupérables. Mais pourquoi les "marchés" spéculent sur la dette grecque? Parce-que c'est ce qui rapporte le plus, le profit ne se fait plus par l'intermédiaire de la production industrielle.

Biensur que ces interventions étatiques sont censées être provisoires, autant que possible. Tous les chefs d'état aimeraient que leurs propres dettes soient remboursées le plus vite possible; Je suis bien d'accord a dire que les capitalistes comme les gouvernements ont intérêt à pratiquer une politique libérale autant que faire se peut; ce que je prétends c'est que les cycles de crise et le stade post-imperialiste du capitalisme oblige nécessairement les états à intervenir dans les économies avec ses grands projets de construction et son investissement dans l'armement. Comme cela fut le cas, à ma connaissance, avant les deux guerres mondiales.

La question se pose: comment redonner confiance aux marchés? Par la croissance, et donc comment? Relancer la consommation, mais pour ça il faudrait augmenter les salaires, embauchent, et là ça coince... Pour etre d'accord avec moi, il faudrait que tu acquiesces a cette idée de cycle que j'ai expliqué dans mon précédent message du 01/11. Tu dis que la période actuelles est pour les capitalistes, mais il est aussi possible qu'ils soient conscients d'etre dans une impasse, c'est peut-etre juste qu'ils vont pas le crier sur les toits.

Pour m'aider a expliquer le façon dont je vois les choses, je te cite un passage de l'édito LO de ce jour. "Même pour accroître leurs profits par l’exploitation, il faudrait que les capitalistes augmentent le nombre des exploités et donc qu’ils embauchent. Ils ne le font pas. C’est de plus en plus l’État qui est mis à contribution pour compléter leurs profits."

Ta derniere remarque dépasse mes connaissances, il faudrait m'expliquer la difference entre "profit", "taux de profit" et "plus-value". Tu sembles expliquer que contrairement à l'époque de Marx, le taux de profit n'est pas uniforme à cause des barrières douanières, mais ça existait deja le cas au XIXème, d'ailleurs bien plus sans la financiarisation extreme due aux nouveaux moyens spéculatifs (internet...)

Ensuite ta toute derniere remarque sur le rapport entre le taux de profit et la part salariale est sans doute juste, mais elle ne contredit pas le fait que l'espace de parts de marché diminuant ne permet plus d'absorber les marchandises produites de plus en plus en surproduction. La seule classe capable de modifier le taux de profit est celle des ouvriers avec leurs revendications.

Bref, c'est du moins ce que j'en pense, mais peut-etre que certains des indignés qui sont entrain de se faire virer de la défense vont nous apporter d'autres lumières. J'en discutais avec un l'autre jour, il niait le fait qu'il s'agisse d'une crise de surproduction, pour lui il ne s'agissait que des conséquences logiques des déréglementations financières décidées dans les années 80.

Pour en revenir à ce sujet d'ailleurs, c'est assez fou de voir à quel point le mouvement des indignés se développe dans beaucoup de pays, mais vraiment très peu en France; j'aimerais croire que c'est parce-qu'en France on a une "tradition révolutionnaire" qui a tendance a se perdre un peu trop, et que les froggies quand on s'énerve on se met réellement beaucoup en colère. Parce-que si on se laisse faire on va se taper de l'austérité bien corsée. Ce serait bien que les syndicats en prennent note, et aient la bonne idée de mettre la pression avant les prochaines échéances électorales afin de montrer que les travailleurs ne sont pas que des vaches à lait. :anim-extermin:
Sinoue
 
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