Dissolution du CCIF

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Re: Dissolution du CCIF

Message par com_71 » 21 Nov 2020, 23:37

La nation française est aussi une construction historique donc "inventée". Et, dans ce domaine, l'invention équivaudrait à l'inexistence ?
Patrocle a tort de décréter l'inexistence - et d'ailleurs où et quand - d'un sentiment de communauté - peuple, nation ou que sais-je encore - juive. C'est tout simplement nier l'évidence.
Cette communauté, comme les autres, n'a pas effacé les classes sociales et les conflits entre elles...
Dans la population "de culture musulmane" il y a aussi des militants ouvriers, des communistes, des religieux bornés, une extrême-droite anti-ouvrière... N'en déplaise à Patrocle.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
Avatar de l’utilisateur
com_71
 
Message(s) : 6260
Inscription : 12 Oct 2002, 00:14

Re: Dissolution du CCIF

Message par Patrocle » 22 Nov 2020, 00:06

Face à toutes ces petits procédés pour parler d'autres choses que le sujet de ce fil voici un texte intéressant de François Burgat qui lui parle du sujet :
Que se passe-t-il en France depuis la mise en scène terroriste, si horriblement « réussie », de la décapitation d’un professeur d’histoire devant son école à Conflans-Sainte-Honorine ?

Une double dérive réactive, qui est très précisément celle-là même qu’espéraient déclencher les terroristes – et c’est bien l’une des raisons de la dénoncer – est en passe de faire franchir à la « France des droits de l’homme » un jalon essentiel de son histoire contemporaine.

De l’islamophobie de la droite à celle de l’État

Irrésistiblement, l’impression s’impose qu’au sommet de la République, ce sont désormais les seules exigences d’une pitoyable rivalité électoraliste entre l’extrême droite et le chef de l’État qui, chez ce dernier, ont pris le pas sur toutes autres considérations.

L’impression s’impose qu’au sommet de la République, ce sont désormais les seules exigences d’une pitoyable rivalité électoraliste entre l’extrême droite et le chef de l’État qui, chez ce dernier, ont pris le pas sur toutes autres considérations

La rhétorique islamophobe – suspicion, amalgame, crainte et ignorance vis-à-vis des musulmans –, un temps cantonnée aux rangs de l’extrême droite, avait certes gagné irrésistiblement la droite puis des pans entiers d’une gauche laïciste en pleine déroute, pas seulement électorale.

Au lendemain de l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine, ce paradigme paradoxal, un temps limité aux collaborateurs d’un hebdomadaire dit « satirique » dont l’ADN, avant qu’il ne tombe dans l’escarcelle de la gauche islamophobe, était celui de la provocation tous azimuts, a été adopté et cautionné par le sommet de l’État.

Une caricature obscène, d’une vulgarité infinie, sans la moindre trace d’humour ou de sens autre que la volonté d’avilir la composante la plus mal représentéedu tissu politique national, semble être devenue, pour le chef de l’État et les élites « républicaines » et « laïques », l’indéboulonnable symbole de la liberté d’expression à la française.

Par le président de la République en personne, la rhétorique de la stigmatisation indiscriminée des croyants musulmans a ainsi été explicitement cautionnée.

L’idéologie sectaire de « l’hiver républicain »

Cette rhétorique est empruntée à l’idéologie d’un groupuscule surmédiatisé, mal nommé le « Printemps républicain », où quelques-uns des perdants et des perdus de la gauche, sous couvert de la défense d’une laïcité grossièrement dévoyée, se sont insidieusement réappropriés les thèses les plus sectaires de leurs anciens rivaux de droite.

Dans la descendance lointaine des thèses de Bernard Lewis (inventeur de l’expression « choc de civilisations ») pour les néo-cons américains, le long des insinuations reprises de longue date par Gilles Kepel, explicitées dans l’ouvrage dirigé par son collègue Bernard Rougier Les Territoires conquis de l’islamisme, la superficie des cibles légitimes de l’opprobre républicain va connaître ainsi une brutale extension.

Une caution officielle est en effet apportée à la thèse – jamais démontrée et largement contredite par les travaux de nombreux universitaires ou d’experts, y compris (comme Marc Sageman) en provenance de la CIA – d’un « écosystème islamiste » qui, tel un « tapis roulant », conduirait inéluctablement au terrorisme tous les musulmans qui entendent seulement conserver une certaine visibilité à leur appartenance culturelle et religieuse ou participer au débat national sur un registre oppositionnel.

Les « travaux » de Bernard Rougier n’exploitent pourtant qu’un filon connu de longue date. Il consiste à présenter sur un mode anxiogène et, dans un désert statistique, en les hypertrophiant très largement, les conséquences d’un dysfonctionnement du « vivre ensemble hexagonal » qui est aussi réel et connu qu’il est ancien.

Ils ne font en effet que confirmer que la machine française à stigmatiser et marginaliser ses citoyens de confession musulmane a malheureusement fabriqué dans nos banlieues des ghettos sociaux au sein desquels se manifeste parfois une contre-culture de rupture et de rejet de l’environnement national plus ou moins explicite.

Mais ces « travaux » à l’emporte-pièce omettent, avec une consternante irresponsabilité, de s’interroger lucidement sur les causes de l’affirmation de cette contre-culture et, plus encore, de dénoncer comme telles les carences massives de ce pouvoir républicain.

Des carences que le chef de l’État lui-même avait pourtant – mais si fugitivement – entrevues clairement dans son discours des Mureaux. « Nous avons nous-mêmes construit notre propre séparatisme. C’est celui de nos quartiers, c’est la ghettoïsation que notre République […] a laissé faire […] nous avons construit une concentration de la misère et des difficultés […] Nous avons concentré les difficultés éducatives et économiques dans certains quartiers de la République […] Nous avons créé, ainsi, des quartiers où la promesse de la République n’a plus été tenue », admettait Emmanuel Macron.

En France, la sphère d’action du « terrorisme d’atmosphère » (« une atmosphère » qui propagerait « la haine des valeurs des sociétés laïques occidentales » selon Gilles Kepel), n’est donc plus réputée être cantonnée aux franges radicalisées des banlieues. Aussi exagérément élargie, on pourrait estimer qu’elle englobe de facto 95 % des musulmans pratiquants.

Le soutien actif de la quasi-totalité des chaînes d’information en continu (de CNews à LCI en passant par BFMTV) aux raccourcis analytiques et éthiques de ce camp-là a longuement préparé cette transition.

Mais l’étape franchie est néanmoins de taille : en octobre 2020, d’une classique islamophobie d’extrême droite, la France est réellement passée à ce que l’on est en droit de nommer une « islamophobie d’État », quasi unique en son genre dans le noyau historique de l’Union européenne.

Les termes du projet de loi « de renforcement de la laïcité » – un temps qualifié de lutte contre le « séparatisme » puis rebaptisé « projet de loi confortant les principes républicains » – et, plus globalement, l’identification de l’origine du terrorisme ne ciblent plus seulement la frange des adeptes d’un langage ou de conduites de rupture.

Ils englobent désormais toute l’infrastructure associative, sportive, commerciale, humanitaire (telle l’ONG Baraka City, dissoute le 28 octobre en Conseil des ministres) ou, a fortiori, de défense des droits individuels comme le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF).

Interdire le CCIF : une mesure contreproductive

Car le paradoxe le plus immédiat de ce virage radical est bien qu’il touche ce CCIF, dont la dissolution est explicitement programmée. Or cette organisation, décrite comme « l’une des rares […] dans lesquelles ont une vraie confiance les musulmans de France », se trouve en réalité être l’un des rares dispositifs capables de limiter les revers contre-productifs que cette brutale radicalisation gouvernementale est en train d’engendrer.

Le pire de la nouvelle stratégie gouvernementale est que la capacité de mobilisation de Daech est manifestement en train d’en tirer profit. Car elle donne soudain une « précieuse » crédibilité à la vieille accusation d’hostilité systématique de la France vis-à-vis des musulmans

Fondé en 2000 par Samy Debah et longtemps dirigé par Marwan Muhammad, lequel est notamment l’auteur d’un ouvrage qui éclaire la portée de son engagement (Nous (aussi) sommes la nation), le CCIF avait vu le jour« parce que les organisations antiracistes traditionnelles [la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) en tête] ne reconnaissaient pas la réalité et les mécanismes de l’islamophobie ».

L’association s’était consacrée depuis lors, avec une remarquable efficacité – louée et exploitée par les défenseurs des droits humains, notamment la Cour européenne des droits de l’homme et l’OSCE dans son rapport sur les crimes de haine –, à recenser et à dénoncer les actes islamophobes, à accompagner les victimes dans leur parcours judiciaire et à produire des études et des mobilisations susceptibles de constituer « un contrepoids face aux discours de haine et au climat de suspicion entretenus par certains médias et personnalités publiques ».

La crédibilité de l’acte d’accusation contre le CCIF (qui notamment « alimente[rai]t les rangs de Daech ») – pour l’essentiel la dénonciation de propos banalement oppositionnels attribués à des proches ou des usagers du Collectif ou la connaissance de son existence par tel « radicalisé » – vole en éclats dès lors qu’on le confronte seulement à l’idéal de « liberté d’opinion » ou « d’expression ». Cette liberté que brandissent pourtant, en toutes circonstances, les accusateurs du CCIF pour justifier la stigmatisation sans limite de la communauté musulmane.

Cette liberté devrait pourtant demeurer le socle d’une République digne de ce nom. En envisageant très sérieusement, à défaut de pouvoir le faire taire, de contraindre le CCIF à l’exil, les dirigeants de ce pays sont donc en train de mettre en œuvre une « riposte » bien contreproductive : pour combattre un mal dramatique, à savoir la propension d’une frange d’individus à quitter le terrain de la lutte politique pour s’engager dans l’action armée, ils s’apprêtent ni plus ni moins à abattre les barrières pares-feux dont il a été amplement démontré qu’elles empêchaient précisément la dissémination de cette dérive.

Pour lutter contre le terrorisme anticapitaliste, aurait-on dissous les syndicats ?

Que se serait-il passé en France si, pour combattre les assassinats opérés au début des années 1980 par le groupe Action directe, qui disait combattre les débordements du capitalisme libéral, la République, sous prétexte qu’ils participaient à une même contestation du patronat, s’en était prise, de la Confédération générale du travail (CGT) à Force ouvrière (FO), à l’entière infrastructure syndicale du pays ?
Comment la France réagirait elle si, dans tel ou tel pays d’Europe centrale, les associations de lutte contre l’antisémitisme devenaient la cible des autorités, qui menaceraient de les dissoudre ?

Le pire de la nouvelle stratégie gouvernementale est que la capacité de mobilisation de Daech est manifestement en train d’en tirer profit. Car elle donne soudain une « précieuse » crédibilité à la vieille accusation d’hostilité systématique de la France vis-à-vis des musulmans – une accusation que, pas seulement dans le monde musulman, Paris a de plus en plus de mal à dissiper.

Comment la France réagirait elle si, dans tel ou tel pays d’Europe centrale, les associations de lutte contre l’antisémitisme devenaient la cible des autorités, qui menaceraient de les dissoudre ?

N’en déplaise aux laborieuses dénégations dont le chef de l’État inonde le monde musulman depuis que la colère s’y est traduite en boycott commercial, un vieux pressentiment est en quelque sorte devenu une réalité : les seuls musulmans considérés comme compatibles avec la République macronienne semblent plus que jamais n’être que ceux qui… ne le sont plus.

Jamais sans doute dans l’histoire récente de la France, une élection présidentielle n’aura-t-elle coûté aussi cher au présent et au futur, proche et lointain, de ses citoyens électeurs, de toutes confessions.
Patrocle
 
Message(s) : 271
Inscription : 28 Fév 2017, 13:57

Re: Dissolution du CCIF

Message par artza » 22 Nov 2020, 06:39

Si je comprends bien Patrocle n'apprécie pas trop la discussion.
Il aime informer de temps à autre en fonction des misères de l'actualité sur ce qui lui tient à coeur la dénonciation et la lutte contre l'islamophobie.

Il poste quelques textes sur ce sujet sur ce forum de discussions.
Peut-être peut-on en discuter?



Sur la dernière communication je ne suis d'accord qu'avec une ou deux choses: "interdire le CCIF une mesure contreproductive".
Encore que pour l'auteur elle est contreproductive pour les intérêts (bien compris ?) de la France. Ce qui vous le comprendrez n'est pas mon souci.

Par ailleurs une campagne anti-musulmane hypocrite (hypocrite parce que à part Zemmour et un dissident du RN, politicards et journaleux sussurent pas d'amalgames etc...) ne peut que contribuer à renforcer ce que Macron dénonce comme du "séparatisme".

J'ai remarqué que Patrocle ne lisait pas tout. Alors je vais en rester là pour ce matin.
artza
 
Message(s) : 2470
Inscription : 22 Sep 2003, 08:22

Re: Dissolution du CCIF

Message par Patrocle » 22 Nov 2020, 10:04

artza a écrit :Par ailleurs une campagne anti-musulmane hypocrite (hypocrite parce que à part Zemmour et un dissident du RN, politicards et journaleux sussurent pas d'amalgames etc...) ne peut que contribuer à renforcer ce que Macron dénonce comme du "séparatisme".

La campagne anti-musulmane serait "hypocrite" ? Ce n'est pas l'adjectif que j'aurais choisi pour la caractériser. Je lui préfère largement "raciste".
La suite de ta phrase est obscure car cette campagne selon toi renforcerait ce "quelque chose" que Macron appelle "séparatisme". Mais à quoi fais tu allusion ?
Patrocle
 
Message(s) : 271
Inscription : 28 Fév 2017, 13:57

Re: Dissolution du CCIF

Message par artza » 22 Nov 2020, 11:42

Cette campagne "hypocrite" alimente le racisme contre les musulmans.
Pourquoi "hypocrite"?
Rapidement, Macron, Darmanin et Le Pen affirment régulièrement qu'ils n'ont rien contre l'Islam et contre les musulmans.

Hitler de son temps n'avait pas ce genre de "réserves hypocrites" pour affirmer son antisémitisme.

Je n'ai entendu que Zemmour et Messiha qui vient de quitter le RN affirmer que l'Islam était "incompatible avec les valeurs de la république" (valeurs qui ne sont pas les miennes).

Cette campagne politique et médiatique ne gêne nullement les islamistes mais les conforte et peut leur donner du crédit entre autres auprès de jeunes stigmatisés pour leur faciès, leur patronyme, leur prénom voir leur lieu d'habitation.

Je suis opposé à l'interdiction du CCIF.
Je n'ai pas plus de considération pour l'anti-racisme du CCIF que pour l'anti-racisme du CRIF.
CRIF dont je rappelle qu'un président avait osé traiter Besancenot d'antisémite sur un plateau de télévision.
artza
 
Message(s) : 2470
Inscription : 22 Sep 2003, 08:22

Re: Dissolution du CCIF

Message par Kéox2 » 22 Nov 2020, 12:26

A la lecture de tes messages Patrocle, je te conseille de lire l'article publié dans la LDC N°181 : Le piège de la "lutte contre l'islamophobie" dont ces 2 extraits, en introduction et en conclusion, résument ce que devraient être la politique des communistes révolutionnaires d'aujourd'hui dans la continuité de ceux d'hier.

Une politique de construction de fronts pour « lutter contre l’islamophobie » est de plus en plus défendue par une partie de l’extrême gauche. Au point de perdre tout repère de classe, et d’user de démagogie vis-à-vis de l’islam politique.


Et en conclusion de l'article :

Cette évolution est un symptôme du recul réactionnaire qui touche la société. Le seul remède contre ce délitement, c’est de défendre sans relâche les perspectives communistes, l’idée qu’on ne peut pas combattre l’oppression en défendant une autre forme d’oppression. C’est de garder sa boussole de classe, de se battre inlassablement pour redonner une conscience aux travailleurs plutôt que la diluer encore un peu plus, de militer pour construire un parti communiste ouvrier.

Dans ce combat, il est indispensable de gagner au communisme des jeunes travailleurs issus de l’immigration, non pas en encourageant leurs préjugés religieux mais en en faisant des révolutionnaires, c’est-à-dire des athées, capables de contrebalancer dans leur propre milieu les idées propagées par les ennemis du mouvement ouvrier.
Kéox2
 
Message(s) : 464
Inscription : 03 Fév 2015, 12:09

Re: Dissolution du CCIF

Message par Cornulier » 22 Nov 2020, 15:20

Là où je bosse , il y a pas mal de jeunes d origine immigrée , pas mal de jeunes maghrébins qui discutent de tout , de foot , de société , de leur exploitation, de complotisme et de tas d autres sujets qui ont rapport avec la vie qu'ils vivent .... Par contre pour le moment aucun ne m'a causé de la dissolution du CCIF et je pense même qu'aucun ne sait ce qu'est ce truc et honnêtement , je pense qu'ils s'en tapent et franchement je suis pas loin de penser qu'ils ont bien raison !
Présenter la dissolution du CCIF comme une attaque contre tous les musulmans et en faire un cheval de bataille prioritaire , il faut laisser ça a ceux qui veulent et c'est en tout cas bien loin de ce que veulent et ce que pensent les travailleurs musulmans il me semble.
Cornulier
 
Message(s) : 81
Inscription : 26 Sep 2004, 20:25

Re: Dissolution du CCIF

Message par Patrocle » 03 Déc 2020, 21:42

Patrocle
 
Message(s) : 271
Inscription : 28 Fév 2017, 13:57

Re: Dissolution du CCIF

Message par com_71 » 13 Jan 2021, 12:30

LO, 06 Janvier 2021 a écrit :Dissolution du CCIF : arbitraire et basse politique

Suite aux assassinats terroristes perpétrés par des islamistes à Conflans-Sainte-Honorine et à Nice, le gouvernement a dissous par un décret en date du 2 décembre le Comité contre l’islamophobie en France (CCIF).

Quelles que soient les thèses du CCIF, et elles sont fort éloignées voire opposées aux valeurs du mouvement ouvrier, cette dissolution et les raisons invoquées par le gouvernement, ses arguments juridiques et ses méthodes administratives apparaissent comme de dangereux précédents.

La décision s’appuie sur le Code de sécurité intérieure, qui permet la dissolution de toute association provoquant à la haine raciale ou se livrant à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme. Or l’administration ne peut citer aucune déclaration du CCIF de cette nature et il n’existe aucune poursuite pénale pour ces motifs contre cette association. Le décret affirme en revanche, et on veut bien le croire sur ce point, qu’il existe sur les réseaux sociaux des commentaires racistes, antisémites, islamistes, etc. émanant soit de membres du CCIF, soit de personnes commentant ses prises de position. Mais, jusqu’à aujourd’hui, on ne pouvait dissoudre une association ou un parti à cause des commentaires qu’il suscite.

L’autre argument, si on peut dire, du pouvoir est que le CCIF a taxé d’islamophobes certaines des mesures prises au motif de la lutte contre le terrorisme. D’une part, cette critique est largement fondée, car ladite lutte contre le terrorisme se résume en bonne partie à une campagne contre les immigrés et les musulmans, le gouvernement et les médias reprenant les thèmes de l’extrême droite. D’autre part et surtout, il s’agit là de la part du CCIF d’une critique politique des actions gouvernementales, du même ordre et énoncée par les mêmes moyens que celles venant d’autres milieux et organisations, sur tous les terrains. Le gouvernement assimile donc le fait de ne pas approuver sa politique à une provocation au terrorisme, et cela lui suffit pour fermer par décret la voix d’une organisation qui le critique.

À ce compte-là, le pouvoir pourrait dissoudre nombre de partis ou d’associations. Par exemple, dénoncer la présence au Mali de l’armée française, qui y intervient au nom de la « lutte contre le terrorisme », et exiger son retrait, pourrait avec la même logique répressive être taxé de complicité avec le terrorisme. Avec quelles conséquences ?

Aujourd’hui, l’arbitraire gouvernemental est surtout un argument électoral pour gagner des voix à droite et à l’extrême droite, voire tout simplement pour donner l’impression que le gouvernement fait quelque chose. Pourtant, la facilité avec laquelle l’administration bâillonne des gêneurs va de pair avec l’allégresse de la police à utiliser ses matraques et avec la rapidité de la justice pour condamner les manifestants.

Paul GALOIS
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
Avatar de l’utilisateur
com_71
 
Message(s) : 6260
Inscription : 12 Oct 2002, 00:14

Re: Dissolution du CCIF

Message par Patrocle » 13 Jan 2021, 21:37

Et bien voilà, Mieux vaut tard que jamais !
Patrocle
 
Message(s) : 271
Inscription : 28 Fév 2017, 13:57

Précédent

Retour vers Politique française

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 1 invité