CITATION (Le Monde @ 31 octobre 2003)
L'extrême gauche se pose désormais en "alternative politique"
A l'occasion de son congrès, ouvert jeudi, la Ligue communiste révolutionnaire doit avaliser l'accord électoral avec Lutte ouvrière. Les deux formations fustigent l'action du gouvernement et se refusent, au second tour des régionales, à fusionner leurs listes avec celles de la gauche plurielle
Les listes Lutte ouvrière-Ligue communiste révolutionnaire seront-elles les seules listes d'union lors des régionales et des européennes du printemps prochain ? Le congrès de la LCR - qui a débuté jeudi 30 octobre à la Plaine Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) - devrait en effet déboucher, dimanche, sur un accord avec Lutte ouvrière. Avant que LO ne se livre au même exercice début décembre. Seul point de désaccord entre les deux formations : l'attitude à tenir - retrait ou maintien - dans le cas où l'extrême gauche obtiendrait 10 % des suffrages dans une région où le FN peut l'emporter.
Pour les deux partis - dont les candidats à l'élection présidentielle de 2002, Arlette Laguiller et Olivier Besancenot, ont réuni respectivement 5,75 % et 4,27 % des suffrages au soir du premier tour, soit un peu plus de 10 % en cumulé -, l'enjeu est de taille. Il s'agit d'ancrer durablement l'extrême gauche comme quatrième pôle dans le paysage électoral français.
"Désormais, nous pouvons intervenir non pas comme simples opposants à la social-démocratie, mais comme une alternative politique directe", résumait, jeudi, François Sabado, l'un des principaux dirigeants de la "Ligue", à l'ouverture du congrès. Un congrès qualifié "d'étape de ravitaillement dans la course qui s'est engagée depuis la présidentielle" par le porte-parole de la LCR, Olivier Besancenot.
Les deux formations, si elles se refusent à faire le moindre pronostic et craignent de faire les frais "d'une abstention par démoralisation" après l'échec du mouvement sur les retraites du printemps, misent toutefois sur deux régions test : le Nord Pas-de-Calais, d'abord, bastion de Lutte ouvrière, où l'apport de la Ligue peut leur faire espérer une quadrangulaire au second tour des régionales ; l'Ile-de-France, ensuite, où la liste commune sera conduite par Arlette Laguiller tandis qu'Olivier Besancenot mènera la bataille dans cette région pour les européennes.
A priori, la ratification du protocole d'accord avec Lutte ouvrière par la LCR ne devrait pas poser problème. Les congrès locaux qui se sont réunis au cours des deux derniers week-ends ont donné une majorité de 70 % aux partisans du texte au sein de la "Ligue". Pour autant, d'ultimes aménagements réclamés, depuis, par LO, suscitent de profondes interrogations au sein de la LCR. Alors que les deux formations se sont mises d'accord "pour envisager d'appeler à voter pour la liste de gauche" dans les cas "où il y aurait un risque de victoire du FN" dans une région, à l'issue du premier tour, LO entend faire préciser la "notion de risque de victoire" qui renvoie pour elle à une menace effective que le FN prenne la direction de la région. La formation d'Arlette Laguiller souhaite également que soit inscrit noir sur blanc dans le protocole d'accord le principe "du maintien des listes communes LO-LCR dans toutes les régions où, ayant recueilli plus de 10 % des votes, elles en auront la possibilité". Pour Jean-Pierre Vial, l'un des dirigeants de LO, l'ajout de cette clause est "logique". "Nous ne sommes pas là pour faire des candidatures de témoignage, explique-t-il. Si les électeurs nous donnent les moyens de nous maintenir, il serait irresponsable que de ne pas le faire." "Il est bien évident que cette clause de maintien ne joue que si Le Pen ne peut pas prendre la région", souligne Alain Krivine, soucieux de rassurer ses troupes. Sans parvenir à convaincre totalement une partie d'entre elles.
"Le second tour de la présidentielle a bien montré que se lier les mains six mois à l'avance était une connerie. Au soir du premier tour, nous avons voulu refuser la banalisation du FN. Aujourd'hui, l'enjeu c'est de garder le cap de cette orientation, de bien veiller à ce que le Front national fasse les scores les plus bas possibles", estimait ainsi François, un militant du 13e arrondissement de Paris. Du coup, les précisions de LO dopent la minorité de la LCR hostile à l'accord. "En Ile-de-France, lorsque Marine Le Pen sera qualifiée pour le second tour, que dira Arlette, notre tête de liste commune ? Elle se refusera à appeler à voter contre elle ?", s'interroge Alain Mathieu, l'un des chefs de file des opposants au texte d'accord.
"L'accord est totalement déséquilibré en faveur de LO. Je les soupçonne en agissant ainsi de vouloir effacer l'effet Besancenot du 21 avril", estime Christian Picquet, autre animateur de la minorité, qui souhaite voir adopter un amendement précisant que le "maintien au second tour sera examiné au cas par cas, après avis des sections locales de la LCR et de LO". "La Ligue doit se battre pour que les deux formations s'engagent à appeler à voter à gauche dans les cas de triangulaires où le FN est présent", ajoute-t-il. "C'est la menace réelle qui compte, rétorque Alain Krivine. Le Pen sera présent dans toutes les triangulaires. Appeler à voter à gauche s'il est présent au second tour revient à appeler à voter à gauche dans tous les cas."
Caroline Monnot
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Le PT n'a pris "aucune décision" pour les régionales
Troisième formation trotskiste, le Parti des travailleurs (PT) n'a " pour le moment pris aucune décision" concernant sa présence aux élections régionales, a indiqué au Monde son porte-parole Carlos Pieroni, vendredi 31 octobre. La formation de Pierre Lambert a prévu de débattre de cette question lors d'un conseil national convoqué le 11 novembre. Le PT a, en revanche, déjà décidé de présenter "plusieurs centaines de candidats" aux cantonales. Le PT réunit par ailleurs son congrès du 16 au 18 janvier 2004.
• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 01.11.03[/quote]