par Cyrano » 13 Mai 2004, 20:47
Un copain a eu une bonne idée (et un peu de zèle). Il a transcrit les témoignages du documentaire qui est passé voici quelques semaines à la télé, sur France 5 et France 2. Ça ne remplace pas une étude sérieuse, mais à défaut…
"Camarades. Il était une fois les communistes français". Réalisation Yves Jeuland.
Dans la partie "Questions de mœurs", après avoir montré la politique du PCF sur l'avortement, le documentaire aborde la politique du PCF vis à vis des homosexuels, dans les années 1960.
Bon, pas simple de transcrire le langage parlé (en plus, là, avec la tête des intervenants). Mais, enfin, bon, voilà :
[Témoignage Alain Krivine, porte-parole LCR]
Au niveau de la vie quotidienne, au niveau des mœurs, y'avait [au PCF] un coté hyper conservateur qui va, à une époque, jusqu'à une hostilité totale aux homosexuels.
Je me souviens encore d'un meeting au Vélodrome d'hiver, avec Jacques Duclos hurlant :
« La classe ouvrière, elle hait les Pédés ! » les pédérastes… [imitant Duclos :] « Les pédérrrastes » – un truc délirant !…
[Témoignage Guy Freiche, postier, ex membre du PCF]
« Dehorrrs les malades ! » qu'il [Jacques Duclos] gueulait à la tribune – et on nous a virés à coups de tartes dans la gueule. Bon… L'affaire est réglée…
Commentaire off : Guy Freiche a été exclu du PCF en 1967.]
[Guy Freiche]
C'est vieux, je m'en souviens toujours, j'en avais été malade… J'ai fait une dépression nerveuse qui a duré pendant trois mois. J'étais lessivé complet. C'est une catastrophe, y'a tout qui s'effondre. Parce que, enfin, c'est la raison pour laquelle j'ai été viré…
J'étais en gros d'accord avec ce que faisait le Parti Communiste Français, je n'avais pas d'esprit critique très développé.
Par contre, on m'a foutu dehors parce que j'étais homo. On m'a fait un grand discours sur : « Faut te soigner… Faut pas rester comme ça… »
Et puis, j'ai pris la décision : j'ai refusé de me soigner, ça me gonflait. On m'a dit : « On ne pourra pas te garder, y'a pas de pédé au Parti ! » – voilà !…
[Question : C'était un début public ?]
[Guy Freiche]
C'était un débat devant le comité fédéral.
[Question : Et toi, tu y assistais ? Qu'est ce que tu disais ? Tu te défendais ?]
[Guy Freiche]
Rien… Mais non, mais non… J'ai dit : point ! rien ! J'ai laissé faire. Qu'est ce que tu veux ?… Tu es cloué… Je ne pensais pas que j'étais un monstre si redoutable que ça… Et puis ce que je faisais, je le trouvais plutôt agréable !
C'est après que j'ai compris que c'était très, très grave. Et c'était dramatique : en gros, j'étais rejeté par tout le monde. Du jour au lendemain, en quelques secondes, tu n'as plus d'amis – puisque tous mes mais étaient dans cette sphère là. Plus rien…
[Commentaire off : Guy est obligé de révéler son homosexualité à ses parents, il quitte Toulouse pour Paris. Au Parti d'alors, on n'aime pas les écarts.]
[Témoignage Antoine Porcu, ancien député PCF]
Oui, j'ai participé à un procès intentée à notre secrétaire fédéral. Le pauvre vieux – enfin, je dis… le pauvre vieux !? – il avait eu une aventure amoureuse avec la femme d'un membre du comité fédéral… Quelle histoire dans le parti !… C'étaient un peu des purs et durs… Des réunions de cellule pour condamner l'adultère !… Moi, je l'ai vu, ça ! J'ai participé à ces réunions… Il a été obligé de partir de Meurthe et Moselle, après cet événement.
[Guy Freiche]
Leur truc, c'était de coller à l'opinion moyenne de la population à laquelle ils s'intéressaient, qui était la classe ouvrière. Il ne fallait pas choquer la classe ouvrière.
Qu'est ce que tu veux… la classe ouvrière c'est plutôt souvent réac sur les idées : le père qui commande, la mère qui fait la vaisselle, les enfants qui marchent au pas. Et c'était ça, c'était un peu cette espèce d'idéologie qui a été secrétée par le Parti communiste de tout temps.
Aujourd'hui, tu dis : t'es homo, au Parti, on te prend, on te montre, on te fait des rideaux, on te met des couronnes, etc.
Ben, à l'époque, s'ils avaient pu nous exterminer ils l'auraient fait ! Chaque fois, ils ont vingt ans de décalage sur un phénomène de société.