A propos du PT bresilien

Dans le monde...

Message par emman » 16 Oct 2002, 10:56

Les positions des principales organisations d'extrême gauche, LO, LCR, PT sur l'élection présidentielles au Brésil.
Pour résumer de manière très simpliste et de tête :

LO insiste sur le rôle de défenseurs des interets de la bourgeoisie que sera amené à jouer Lula (Lutte Ouvrière), la LCR critique la consensualité du discours de Lula mais ne s'en désolidarise pas (Rouge), le PT salue lui la future victoire de Lula comme un pas vers la mobilisation populaire et l'émancipation du Brésil par rapport au FMI tout en occultant presque ses déclarations très modérées (Informations Ouvrières).

Je suis a priori, plutôt d'accord avec la position de LO, mais cela fait un peu du PT Bresilien l'équivalent du PS français, or sa base sociale ne serait-elle pas un peu différente ? Je me pose la question de savoir si les révolutionnaires ont encore la possibilité d'y mener une politique sans se renier. :wacko:
emman
 
Message(s) : 0
Inscription : 02 Oct 2002, 12:44

Message par stef » 16 Oct 2002, 11:49

Le PT est incontestablement un parti OUVRIER. A l'origine de sa constitution, il y a les syndicalistes de Sao Paulo, etc.
Sa création a été un pas en avant gigantesque du prolétariat brésilien, puisqu'il n'existait pas un tel parti avant : la classe ouvrière dispose désormais d'un parti susceptible de se porter candidat au pouvoir.


Historiquement la direction du PT avait des positions assez "gauche" - par exemple le refus de payer la dette. Par ailleurs, le PT fonctionne d'une façon suffisamment démocratique pour permettre l'expression des divers courants. D'où le fait que la quasi-totalité des courants du mouvement ouvriers en aient été membres et le demeurent encore aujourd'hui.

Le problème est qu'au fil des années la direction Lula s'est faite domestiquer peu à peu. Son adhésion à l'Internationale socialiste, son acceptation des plans du FMI le montrent bien. La "démocratie participative" est un autre exemple : il ne s'agit en définitive que de cogérer le capitalisme au lieu de le renverser.

D'où la campagne actuelle de Lula, qui se concrétise par le fait que son colistier est un dirigeant d'un parti bourgeois.

Par ailleurs, il est évident que le Capital a accepté les offres de service de Lula. L'état des partis bourgeois est tel qu'il n'y a pas d'autres solutions. Surtout si on a en tête que le pays est au bord de sombrer à l'image de l'Argentine (cf l'effondrement de sa monnaie). Il n'en demeure pas moins que l'élection de Lula sanctionnera un affaiblissment incontestable de la très faible bourgeoisie locale.
-------------------------------------------------------------------------------------------

Alors quelle orientation ?

Cela me semble évident. Peut-on accepter d'une organisation ouvrière qu'elle soutienne un politicien bourgeois comme le vice-président prévu par Lula ? Evidemment pas. D'autant plus que ceci est inséparable des plans anti-ouvriers préparés par Lula et la direction du PT. Conclusion : soutenir Lula dans ces élections est totalement réactionnaire.

Semer pour l'avenir, préparer les travailleurs à résister à l'offensive patronale qui va avoir lieu nécessite de tenir bon sur cette question. Au Brésil, cela impliquait d'intervenir sur l'orientation de la rupture de la coalition PT-Parti Libéral, que le PT se dote d'un programme anti-capitaliste (p. ex. refus des plans du FMI). Bref, il s'agit d'intervenir [I]en défense du PT[I], menacé par la politique même de sa direction.
stef
 
Message(s) : 0
Inscription : 15 Oct 2002, 11:50

Message par pelon » 16 Oct 2002, 12:53

Je me souviens de meetings de Krivine où il expliquait que le PT brésilien était le modèle de ce que la Ligue voulait faire: un vaste rassemblement "radical", plus large que la seule extrème gauche. Besancenot y faisait également référence dans sa campagne.

Aujourd'hui, Rouge critique les positions de Lula.

Les sympathisants de la ligue pourraient-ils me dire,au delà de la critique de la campagne de Lula, si ce modèle leur semble toujours à l'ordre du jour? Et pourquoi à leur avis, le PT a dérivé de cette manière, comment ils comptent empêcher une telle dérive dans le cas où un tel rassemblement verrait le jour en France.

Mon opinion est qu'un parti qui ne définit pas très clairement sa politique, qui ne se place pas clairement sur un terrain de classe, qui fait des concessions pour attirer sur sa droite, bref une mouvance radicale type PSU ne peut qu'évoluer de cette manière.

Par ailleurs, je suis surpris que Stef voit dans la création du PT un "pas en avant". Il me semble que tout parti ouvrier social-démocrate est un obstacle à la construction d'un véritable parti communiste, et non une aide. (A cause des illusions que cela donne dans des politiciens comme Lula, justement).
pelon
 
Message(s) : 33
Inscription : 30 Août 2002, 10:35

Message par pelon » 16 Oct 2002, 13:28

(eric_bf @ Wednesday 16 October 2002, 13:53 a écrit :
Par ailleurs, je suis surpris que Stef voit dans la création du PT un "pas en avant". Il me semble que tout parti ouvrier social-démocrate est un obstacle à la construction d'un véritable parti communiste, et non une aide. (A cause des illusions que cela donne dans des politiciens comme Lula, justement).

Je crois que Stef a raison. Là où aucun parti ouvrier existe (et au Brésil vu ce qu'est devenu le pC, on peut dire que c'est le cas), sa création est une avancée, toute relative il est vrai. A ce propos, Stef saura nous dénicher les textes de Trotsky sur la nécessité d'un parti ouvrier américain ... qui fait toujours défaut. Bien entendu, ce parti ouvrier, on le veut le plus beau possible mais ce n'est pas tout ou rien.
Cela n'empêche pas certains partis ouvriers de devenir des monstres et de n'être plus qu'historiquement des partis ouvriers. A ce niveau, le PT, malgré les nombreuses organisations d'EG qui y militent est mal parti.
pelon
 
Message(s) : 33
Inscription : 30 Août 2002, 10:35

Message par stef » 16 Oct 2002, 13:30

Pour les références, on va s'en occupper fissa. Je dois ça à Eric depuis des mois.
stef
 
Message(s) : 0
Inscription : 15 Oct 2002, 11:50

Message par stef » 16 Oct 2002, 16:11

Pour la biblio, j'ai un léger pb de trou dans mes archives. Mais sur la question du Parti Ouvrier, on se reportera aux articles de Trotsky qui doivent être titrés "1° discussion sur le Labor Party" et "2° discussion sur le Labor Party". Je suis presque sur qu'on les trouve dans les tomes 17 ou 18 des oeuvres publiées chez EDI. Si un cde peut vérifier et confirmer, merci d'avance.
----------------------------------------------------------------------------------------------
En tout état de cause, le coeur de la question est le suivant.
1/ Il existe une série de pays où le prolétariat n'a pu constituer ses propres organisations de classe - en particulier ses propres Partis. C'est en fait l'essentiel de la planète : USA, Afrique, une bonne partie de l'Amérique Latine (dont l'Argentine), Palestine, Algérie, etc. N'oublions pas que l'Europe a été le berceau du mouvement ouvrier depuis la social-démocratie.

2/ N'étant pas des dogmatiques, nous ne pouvons qu'être INCONDITIONELLEMENT pour tout pas en avant aussi limité soit-il dans la voie de l'indépendance de classe. C'est d'autant plus essentiel que dans les pays où n'existent pas de tels partis, cela signifie que la possibilité d'un gouvernement ouvrier devient un sujet de propagande et ne peut être posée comme une tâche immédiate.

3/ L'absence de Parti Ouvrier structurant la classe a aussi évidemment de progfondes répercussions sur sa conscience. N'importe quel trotskyste voyageant aux USA racontera que peu d'habitants de ce pays sont capables d'appréhender des notions de solidarité ouvrière élémentaire - ne serait-ce que le droit à la Santé, au Travail, etc.
Cela signifie aussi que si le programme du marxisme (le Socialisme, etc.) a à être défendu (évidemment !), cela ne peut se faire que dans des conditions beaucoup plus difficiles. Ce ne peut être un préalable absolu à l'inverse d'ici - où la classe ouvrière a fait à d'innombrables reprises l'expérience de ce que signifie la politique des appareils. Construction du Parti Ouvrier et défense du programme sont deux tâches liées ("Un parti pour revendiquer quoi ?").

4/ Ce que ceci signifie c'est que dans ces pays, les trotskystes défendent inconditionnellement la nécessité d'un Parti Ouvrier, rassemblant les travailleurs sur des bases de classe (en s'appuyant sur l'existence des syndicats lorsque c'est possible). On peut faire un certain parrallèle avec l'expérience anglaise où les syndicats ont créé un parti (le Labour Party) afin de disposer d'un outil et cesser d'être entre les mains du Parti Libéral.

Exemple. Aux USA, il me semble tout à fait juste d'intervenir en direction des dirigeants de l'AFL-CIO (le syndicat) en exigeant d'eux qu'ils cessent de soutenir les démocrates et appellent à la constitution d'un parti du Travail permettant à la classe d'être présente en tant que telle sur tous les terrains - notamment électoraux.

Autre exemple. L'existence du PT brésilien - de par son existence même - a été un bouleversement de la vie politique du pays.

5/ Il faut aussi rappeler que de tels partis ne peuvent demeurer des partis authentiquement ouvrier que s'ils s'arment d'un programme de rupture avec le capitalisme - ainsi que le montre aussi le cas du Brésil. Ce qui pose de nouveau la question la question de la construction d'avant-garde marxistes comme partie intégrante de ces processus.
stef
 
Message(s) : 0
Inscription : 15 Oct 2002, 11:50

Message par pelon » 16 Oct 2002, 16:21

(stef @ Wednesday 16 October 2002, 17:11 a écrit :
N'étant pas des dogmatiques, nous ne pouvons qu'être INCONDITIONELLEMENT pour tout pas en avant aussi limité soit-il dans la voie de l'indépendance de classe.

(...)

4/ Ce que ceci signifie c'est que dans ces pays, les trotskystes défendent inconditionnellement la nécessité d'un Parti Ouvrier, rassemblant les travailleurs sur des bases de classe (en s'appuyant sur l'existence des syndicats lorsque c'est possible).

(...)

5/ Il faut aussi rappeler que de tels partis ne peuvent demeurer des partis authentiquement ouvrier que s'ils s'arment d'un programme de rupture avec le capitalisme - ainsi que le montre aussi le cas du Brésil. Ce qui pose de nouveau la question la question de la construction d'avant-garde marxistes comme partie intégrante de ces processus.

Mais en quoi un PT près à s'allier avec des bourgeois libéraux peut-il être un pas en avant "dans la voie de l'indépendance de classe".

Où est l'indépendance de classe dans le cas du PT?
pelon
 
Message(s) : 33
Inscription : 30 Août 2002, 10:35

Message par stef » 16 Oct 2002, 17:37

[QUOTE]Mais en quoi un PT près à s'allier avec des bourgeois libéraux peut-il être un pas en avant "dans la voie de l'indépendance de classe".

Où est l'indépendance de classe dans le cas du PT? [QUOTE]

La simple existence du PT est une entrave - au moins potentielle - à la mise en oeuvre des plans du Capital. Tu comprendras aisément que sa capacité à mettre en oeuvre jusqu'au bout les plans exigés par Bush ne se se passera pas sans immenses difficultés. De même que - quelle que soit leur bonne volonté - les dirigeants du PS & du PCF n'ont pu aller aussi loin que Chirac et Raffarin (je crois que ceci se mesure jour après jour, non ?).

Par ailleurs, je voulais dire la chose suivante sur l'"l'indépendance de classe". Il est bien évident que l'existence d'un PT, l'expérience politique accumulée (en positif comme en négatif ) marque la conscience des travailleurs brésiliens. Elle les a convaincu que disposer d'un parti ouvrier est non seulement utile et nécessaire mais possible. Il est donc bien évident que son bilan est un immense point d'appui pour la construction d'un parti authentiquement indépendant - ce qui ne peut en définitive qu'être un parti trotskyste (sinon je ferais autre chose !).

Suis-je plus clair ?
stef
 
Message(s) : 0
Inscription : 15 Oct 2002, 11:50

Message par pelon » 16 Oct 2002, 17:57

(stef @ Wednesday 16 October 2002, 17:11 a écrit :Pour la biblio, j'ai un léger pb de trou dans mes archives. Mais sur la question du Parti Ouvrier, on se reportera aux articles de Trotsky qui doivent être titrés "1° discussion sur le Labor Party" et "2° discussion sur le Labor Party". Je suis presque sur qu'on les trouve dans les tomes 17 ou 18 des oeuvres publiées chez EDI. Si un cde peut vérifier et confirmer, merci d'avance.
----------------------------------------------------------------------------------------------
En tout état de cause, le coeur de la question est le suivant.
1/ Il existe une série de pays où le prolétariat n'a pu constituer ses propres organisations de classe - en particulier ses propres Partis. C'est en fait l'essentiel de la planète : USA, Afrique, une bonne partie de l'Amérique Latine (dont l'Argentine), Palestine, Algérie, etc. N'oublions pas que l'Europe a été le berceau du mouvement ouvrier depuis la social-démocratie.

2/ N'étant pas des dogmatiques, nous ne pouvons qu'être INCONDITIONELLEMENT pour tout pas en avant aussi limité soit-il dans la voie de l'indépendance de classe. C'est d'autant plus essentiel que dans les pays où n'existent pas de tels partis, cela signifie que la possibilité d'un gouvernement ouvrier devient un sujet de propagande et ne peut être posée comme une tâche immédiate.

3/ L'absence de Parti Ouvrier structurant la classe a aussi évidemment de progfondes répercussions sur sa conscience. N'importe quel trotskyste voyageant aux USA racontera que peu d'habitants de ce pays sont capables d'appréhender des notions de solidarité ouvrière élémentaire - ne serait-ce que le droit à la Santé, au Travail, etc.
Cela signifie aussi que si le programme du marxisme (le Socialisme, etc.) a à être défendu (évidemment !), cela ne peut se faire que dans des conditions beaucoup plus difficiles. Ce ne peut être un préalable absolu à l'inverse d'ici - où la classe ouvrière a fait à d'innombrables reprises l'expérience de ce que signifie la politique des appareils. Construction du Parti Ouvrier et défense du programme sont deux tâches liées ("Un parti pour revendiquer quoi ?").

4/ Ce que ceci signifie c'est que dans ces pays, les trotskystes défendent inconditionnellement la nécessité d'un Parti Ouvrier, rassemblant les travailleurs sur des bases de classe (en s'appuyant sur l'existence des syndicats lorsque c'est possible). On peut faire un certain parrallèle avec l'expérience anglaise où les syndicats ont créé un parti (le Labour Party) afin de disposer d'un outil et cesser d'être entre les mains du Parti Libéral.

Exemple. Aux USA, il me semble tout à fait juste d'intervenir en direction des dirigeants de l'AFL-CIO (le syndicat) en exigeant d'eux qu'ils cessent de soutenir les démocrates et appellent à la constitution d'un parti du Travail permettant à la classe d'être présente en tant que telle sur tous les terrains - notamment électoraux.

Autre exemple. L'existence du PT brésilien - de par son existence même - a été un bouleversement de la vie politique du pays.

5/ Il faut aussi rappeler que de tels partis ne peuvent demeurer des partis authentiquement ouvrier que s'ils s'arment d'un programme de rupture avec le capitalisme - ainsi que le montre aussi le cas du Brésil. Ce qui pose de nouveau la question la question de la construction d'avant-garde marxistes comme partie intégrante de ces processus.

J'ai à peu près la même chose dans ma mémoire (je n'ai pas avec moi les oeuvres de Trotsky, je verrai ce soir). J'ai particulièrement en tête les USA et la tactique proposée par LT en direction d'un certain Laffolette (?). Connaissant un peu les USA, j'avais remarqué comment les ouvriers avaient peu conscience d'avoir des intérêts à part (en tant qu'ouvriers). Ce qui n'est pas contradictoire avec une tradition de lutte de classe.
Un socialiste, un communiste, pour un ouvrier américain, m^me combatif, c'est un martien. La partie de la classe ouvrière qui vote (une minorité) vote démocrate. Il n'y a m^me pas le faux semblant de partis comme le PC ou le PS disant représenter les intér^ts de la population laborieuse.
Demandez aux trotskystes américains si c'est un avantage.

Par ailleurs, je ne valide pas pour autant le travail des trotskystes à l'intérieur du PT, un certain opportunisme des morénistes par exemple mais c'est une autre discussion.
pelon
 
Message(s) : 33
Inscription : 30 Août 2002, 10:35

Suivant

Retour vers Actualités internationales

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 3 invité(s)