cadres et bourgeois dans un parti ouvrier

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par zarta » 06 Juil 2004, 13:07

Les cadres sont des personnes ayant reçu une formation supérieure qui leur permet d'encadrer une équipe de travailleurs... Normalement, mieux payés que les employés ou les ouvriers, ils entrent donc dans la catégorie des bourgeois par la quantité d'argent qu'ils détiennent. Mais aussi parce qu'ils se font souvent les laquais du capitalisme : ils sont dans l'entreprise pour faire "obéir" les employés, pour faire appliquer les directives patronales (ou ministérielles pour les fonctionnaires).
Cependant, les cadres, par leur formation supérieure, ne seraient -ils pas plus à même d'encadrer également les militants d'un parti ouvrier ? Leur formation (universitaire - ça c'est pour manu et tovarich :-P ) ne leur donne-t-elle pas les moyens "intellectuels" de mener à bien une réflexion sur la situation économique mondiale et nationale, et de proposer les moyens à mettre en oeuvre pour organiser la lutte pour la défense des intérêts de la classe ouvrière (ou de travailleurs en général) ?
Leur appartenance à la bourgeoisie en terme de quantité d'argent les empêche-t-elle d'avoir une conscience de lutte de classe ? Cette définition de la bourgeoisie n'est-elle pas réductrice au point que l'on pourrait croire que tous les ouvriers ont une conscience de classe simplement parce qu'ils ne sont pas riches ?
Un parti ouvrier (de lutte de classe) ne prend-il pas de risque s'il s'appuye sur des cadres "bourgeois" parce que ceux-ci pourraient un jour ou l'autre rebasculer dans une lutte pour l'intérêt de leur propre classe (ou carrément pour leurs intérêts personnels) et trahir la cause ouvrière en transformant la lutte révolutionnaire en revendications démagogiques de réformes ? Le cas du PS est particulièrement édifiant dans ce domaine ; mais ne s'agit-il pas là de trahisons venues d'intellectuels seulement, et qui ne concernent pas toutes les personnes ayant reçu une formation supérieure leur permettant de devenir cadres et donc assez "riches".
Si pour ce prémunir de telle trahison, un parti ouvrier évite de mettre des cadres à la direction du parti, ne se coupe-t-il pas d'un ensemble de personnes capables d'analyses profondes ? Est-ce à dire qu'un parti ouvrier devrait dans un premier temps s'appuyer sur des cadres issus éventuellement de la bourgeoisie pour s'en débarrasser par la suite, une fois les temps révolutionnaires passés et le socialisme établi ? Ce qui fait penser à la révolution "culturelle" maoïste (des années 1960 je crois ?) qui a coupé la tête de toute l'intelligentsia chinoise sous prétexte qu'elle venait de la bourgeoisie et qu'elle était par conséquent "douteuse".
Dans ce cas, qu'advient-il des intellectuels (et des cadres) issus de la classe ouvrière ? (je parle pour moi là, il faut bien un peu d'égocentrisme :roll: )
Une fois qu'un individu atteint les sphères "dirigeantes" n'est-il pas tenté de se croire au dessus des masses ? et donc éventuellement de trahir la Révolution quelles que soient ses origines de classe réelles ? Un parti ouvrier dont la direction est entre les mains de cadres issus de la bourgeoisie ne prend-il pas le risque, a contrario, de former un parti d'élite, susceptible de se détacher des revendications réelles des travailleurs ?

réponse personnelle très succinte : je me méfie des cadres du parti et des bourgeois en général, même s'ils ont une conscience politique de lutte de classe parce que dès lors qu'ils roulent dans des grosses bagnioles et qu'ils habitent dans des pavillons, je ne suis pas sûre qu'ils comprennent bien toutes les revendications des travailleurs qui habitent dans des HLM pourries et qui n'ont pas de quoi manger quotidiennement. La conscience politique ne s'acquiert pas seulement par raisonnement intellectuel ; elle doit être aussi, à mon sens, confrontée à un vécu. Pourtant, je ne pense pas que l'on puisse affirmer, qu'une fois le socialisme en place, ils faudrait zigouiller les cadres issus de la bourgeoisie (... les pauv'). Car le socialisme n'est pas là pour éliminer les gens. Toujours est-il que si on les élimine ne serait-ce que de l'encadrement de la société, ils pourraient bien se servir de leur capacité de raisonnement pour trouver les failles de la société qui puissent servir leurs propres intérêts, frustrés qu'ils seraient de se voir relégués à une place qui ne serait pas une place confortable "de dirigeants".

Quelle est votre position sur la définition et la place des "cadres", cadres de la société et cadres d'un parti de lutte de classe ?
zarta
 
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Message par Mariategui » 06 Juil 2004, 13:44

a écrit :Normalement, mieux payés que les employés ou les ouvriers, ils entrent donc dans la catégorie des bourgeois par la quantité d'argent qu'ils détiennent.


C'est un raccourci étonnant, quid de la possession des moyens de production ? En fait, ceci posse une question intéressante. Le fonctionnement du système capitaliste se caractérise par un processu de "division sociale du travail" et donc par la différenciation des salaires et des fonctions des travailleurs. de fait, des couches entières du prolétariat peuvent être cooptés partiellement à travers des "salaires" plus importants que la moyenne et un prestige social recconnu. A mon avis, cette différenciation interne du champ du prolétariat explique pourquoi des salariés, a priori appartenant à la couche des prolétaires (par exemple, un vocat ne possède que sa propre force de travail dans l'immense majorité des cas, à moins qu'ils soit propriétaire d'un cabinet et qu'il en eploite d'autres), se situent dans le champ de la bourgeoise lors des crises. En fait, ces couches prolétaires n'ont plus "que leurs chaînes à perdre". Le statut qui leur est recconnu par la bourgeoise leur assure un certain nombre de privilèges dans le cadre de la société capitaliste. Dans ces conditions, ils font massivement le pari de défendre l'ordre contemporain plutôt que de se lancer dans l'inconnu de la révolution. Tout ca pour dire que notre définition de prolétariat et de bourgeoisie doit prendre en compte ces phénomènes de différenciation interne du monde du travail. Certes, des nombreux avocats pourront (et se sont) se placer sur la champ des travaileurs, mais comme couche, il est sûr qu'ils défendront les intérêts de la bourgeoise.

Les cadres en tout ca? Déjà, qui dit cadre ne dit pas bourgeois. On ne peut pas confondre statut et classe même si les liens existent comme je viens de le montrer. Sinon, la catégorie cadre est beaucoup trop large pour mener une analyse en couche et le salaire ne me paraît pas être le seul critère à prendre en compte. Par exemple, entre professeur certifié et professeur agrégé, la différence de salaire en fin de carrière doit être de 4000 francs. Il est clait pour moi que ce ligne de classe entre prolétariat et bourgeoise n'est pas à quatre mil balles près . En revanche, les agrégés ont une tradition réac du fait de la différenciation sociale entre ses deux statuts au sin de l'education nationale, les agrégés étant une élite a priori.

a écrit :Quelle est votre position sur la définition et la place des "cadres", cadres de la société et cadres d'un parti de lutte de classe ?


Pour reprendre à ta question, personnellemet ca ne me gêne pas puisque justement il n'y a pas d'équivalence entre cadre et bourgeois. la place de tel ou tel cadre dans une organisation révolutionnaire est à mon avis fonction de son positionnement personnel dans la lutte de classe et de son engagement politique. Sur la place des cadres dans le parti communiste révolutionaire. Je crois que c'est un questionnement très ancien, qui était posé avant dans les termes de quel place pour les travailleurs "intellectuels" par rapports aux manuels au sein du parti révolutionnaire. Car souvent les intellectuels se caractérisaient par leurs démarches "dirigistes" et par la reproduction de la césure intellectuels manuels au sein même du parti ouvrier. Ca c'est un problème réel et personnellement, je ne sais pas s'il y a une solution contre ca, car croire que le travailleur manuel est doué d'une préscience naturelle qui leur éviterai de devenir opportuniste ou réformiste est faire preuve d'une belle naiveté. Ce qui serait bien, ce serait l'émergence de cadres de type nouveau au sein du PCR, des intellectuels manuels et des manuels intellectuels, brefs, des hommes capables de développer une politique révolutionnaire tout en "sentant" parfaitement les évolutions de la classe ouvrière.
Mariategui
 
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Message par Mariategui » 06 Juil 2004, 14:56

Je ne suis pas sûr que la direction du parti bolchévique puisse être qualifié de petite bourgeoise. Personellement, je dirais des intellectuels déclassés.
Mariategui
 
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Message par pelon » 06 Juil 2004, 15:03

(Mariategui @ mardi 6 juillet 2004 à 15:56 a écrit : Je ne suis pas sûr que la direction du parti bolchévique puisse être qualifié de petite bourgeoise. Personellement, je dirais des intellectuels déclassés.
Dire que certains dirigeants du parti bolchévik, et non les moindre, proviennent de la petite bourgeoisie, ce qui est un fait, ne veut pas dire que c'est une direction petite bourgeoise.
pelon
 
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Message par logan » 06 Juil 2004, 15:06

Marx a renoncé à une grande carrière d'universitaire ou de politique bourgeois et a fini quasiment dans la misère.
Ce n'est pas la même situation qu'un cadre responsable des ressources humaines dans une grande entreprise.
logan
 
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Message par Nadia » 06 Juil 2004, 17:09

Et puis les "cadres"... Yen a plein certaines boîtes d'informatique ou d'ingénieurie par exemple et la plupart desdits cadres n'encadrent que leur souris en plastique. Tout ça pour que le patron ait des avantages légaux alors que le boulot est celui d'un simple subalterne en bas de l'échelle, pourvu que le salaire dépasse un minimum légal.

Et puis, le niveau de salaire ne fait pas la classe sociale. Un artisan tout seul au bord de la misère est un bourgeois (travailleur celui-là), alors qu'un pilote d'avion civil est un prolétaire (bien payé celui-là).

Quant aux "intellectuels", il serait bon que ceux-ci aient un vrai métier par derrière, histoire de leur assurer une liberté de penser. Dans ce cas, ils peuvent très bien devenir de bons marxistes.
Nadia
 
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