De l'engagement militant à l'exploitation éhontée
Les centres de vacances et de loisirs ont été créés par des militants d'éducation populaire, très souvent bénévoles.
Aujourd'hui la situation a évolué, de nombreuses municipalités ont développé leurs propres centres, les grandes associations d'éducation populaire sont devenus des prestataires de service, quant aux animateurs "engagés volontaires", il s'agit pour la plupart de jeunes cherchant un travail d'animation...
Certains d'ailleurs vont se professionnaliser.
Personnellement j'ai été bénévole pendant de nombreuses années dans différents mouvements, il s'agissait là d'un choix militant sincère et fort que je pouvais opérer comme beaucoup de mes camarades d'alors... Nous n'avions pas trop de difficultés...Pour ma part, normalien, je percevais un salaire dans la semaine et pouvais donc m'engager dans un bénévolat complet le jeudi, le dimanche et durant les congés d'été.
Aujourd'hui le chômage est le quotidien de beaucoup, de nombreuses familles connaissent des difficultés...
Nous sommes en présence aujourd'hui de jeunes en recherche d'un job d'été.
Ce "job"demande du punch, une certaine "vocation" certes mais il s'agit d'un travail...
Des jeunes âgés de 17 ans et plus arrivent à travailler à raison de 16 heures par jour en centre de vacances, six jours sur sept, c'est à dire durant un minimum de
96 heures hebdo pour une "indemnité" de moins de 17 €.
Vous pouvez d'ailleurs lire attentivement la note suivante tirée du site de la JPA:
"
Forfait journalier brut minimum pour l'année 2004 :
Les animateurs des centres de vacances et de loisirs encadrent les enfants durant les temps hors scolaires. Cet engagement spécifique, à la fois éducatif, social, solidaire et citoyen, se situe à côté du bénévolat et du salariat. Ces animateurs dépendent de l'annexe II de la convention collective de l'animation. Tandis que les repas et l'hébergement sont intégralement à la charge de l'organisateur du centre, les animateurs perçoivent un forfait journalier brut et sont assurés par la Sécurité sociale. Jusqu'au 30 avril 2004 A compter du 1er mai 2004
16,68 € minimum par jour 16,91 € minimum par jour"
Certains animateurs "volontaires" sont même des bénévoles contraints : ils viennent de se payer ne session théorique BAFA et il leur faut trouver une stage pratique d'animateur en exercice de 14 jours...Ils ont cherché et trouvé enfin ... Un stage pratique non rémunéré...
Ce scandale doit cesser... l'animation est un "engagement éducatif et social" et non un "esclavage éducatif".....
Tout travail mérite salaire
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Les opinions qui y sont exprimées le sont à titre personnel.
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De l'engagement militant à l'exploitation éhontée
8 message(s)
• Page 1 sur 1
par Gaby » 19 Août 2004, 15:24
J'ai une expérience toute récente datant de cet été (j'suis animateur)... qui a de quoi faire réfléchir.
Je vous raconterai quand j'aurai un peu plus de temps devant moi. Quitte à raconter, autant le faire exhaustivement.
Je vous raconterai quand j'aurai un peu plus de temps devant moi. Quitte à raconter, autant le faire exhaustivement.
- Gaby
- Message(s) : 401
- Inscription : 27 Fév 2004, 10:53
par Valiere » 29 Août 2004, 10:11
Gaby tu as promis une contribution, vas y ainsi que les autres camarades...
Les grandes directions des mouvements d'éducation populaire s'apprêtent à réussir à faire passer leur proposition de "contrat d'engagement éducatif" contre l'avis des syndicats...Il faut préparer la riposte et poursuivre le débat.
Les grandes directions des mouvements d'éducation populaire s'apprêtent à réussir à faire passer leur proposition de "contrat d'engagement éducatif" contre l'avis des syndicats...Il faut préparer la riposte et poursuivre le débat.
- Valiere
- Message(s) : 0
- Inscription : 07 Mars 2004, 22:35
par Gaby » 29 Août 2004, 16:09
Excuse moi d'avoir un peu zappé... mais je passais en coup de vent sur le forum ces jours-ci, avec juste le temps de lire les sujets les plus intéressants. Là j'ai tout le temps du monde devant moi.
Comme tu l'expliques bien, un animateur est légalement un bénévole au service de l'enfant. Un jeune qui adore le contact avec les gosses et pour se faire un peu d'argent de poche ou pour l'expérience, se consacre à l'animation... Y'a quelques bons cotés en plus du simple "militantisme". On rencontre souvent des chics types, on a parfois de la chance en tombant sur un séjour sympa... Mais c'est assez fréquent d'en chier. Je vais raconter mon été où là, j'ai atteint des sommets de manque-de-bol.
J'ai été embauché gràce à une annonce sur internet pour un camp de vacances dans les Hautes Alpes. J'étais assez emballé d'animer un camp pour 4 - 12 ans ; on m'avait dit que les gosses étaient difficiles mais ca m'a pas mis la puce à l'oreille... On a eu plus d'infos en arrivant sur le site : un animateur du séjour précédent a eu des points de suture à la main, les gosses rendaient fous l'équipe, énormément de bastons entre gamins, etc. Lors du premier "cinquième repas" (les réunions journalières avec anim's, directeur, personnel technique parfois) on en a su un peu plus : les gamins (des quartiers nords de Marseille) passent par la CAF et le séjour coute 40euros pour les familles. La quasi-totalité des enfants sont en difficulté scolaire, 40% sont en foyers, une bonne part sont suivis par des assistantes sociales et on en avait même qui étaient suivis par des juges (!). Je suis pas médecin mais certains avaient de gros gros gros problèmes mentaux... Je ne saurais pas mettre un nom dessus mais comme exemple, y'avait un gamin pas foutu de dire autre chose que "pute" et de bouffer avec les sourcils (il avait 12 ans). Des parents te balancent les gosses là comme pour s'en débarasser. A titre anecdotique, on a reçu des lettres nous disant que si leur enfant nous embêtait, on pouvait le ligoter sur une chaise.
La pratique de tous les jours, c'était d'arrêter leurs altercations tout le temps, de crier à en cracher du sang (je ne blague pas), de leur faire prendre un peu de plaisir de temps en temps et de les fatiguer en les faisant bouger un max. C'était dur.
Bref, ce sont des gosses à qui il faut des éducateurs. Et nombreux ! Bilan, qui s'est retrouvé à s'occuper d'eux ? 11 jeunes animateurs dont plus de la moitié étaient stagiaires, rémunérés 17 euros pour une journée commençant à 8 heures du mat' (en étant opérationnel, plus tôt si les gosses sont chiants la nuit) jusqu'à parfois 2 heures du mat' (1h du mat' pour les journées les plus calmes). C'était de l'exploitation. Les anim's, garçons comme filles, ont craqué moralement et physiquement. Moi ca s'est fini à l'hosto pour hypoglycémie sévère (0.4 gr de sucre / l de sang) : je bouffais pas assez par rapport à l'énergie dépensée (je prenais pas de pause pendant la journée, n'ayant pas le besoin de cloper, me retrouvant parfois avec 40 ou 60 gosses pour 2 ou 3 animateurs seulement dans le coin). 6 jours après mon départ, c'est 5 animateurs qui démissionnent par rapport à un travail infaisable et une directrice insupportable qui nous compliquait la tâche. Quelques jours plus tard encore, rajoutez 5 démissions avec un bout du personnel technique (rémunéré 32 euros/j pour un travail un peu plus supportable, mais l'indemnité est toujours dérisoire en comparaison au taf).
Ce qu'il faut savoir aussi, c'est que la directrice a mis sur le dos de l'alcool mon malaise et comptait envoyer un rapport sur moi au ministère jeunesse&sport pour que je sois sur les listes noires (jusqu'à ne plus pouvoir faire de l'encadrement dans mon club de basket). Un coup de fil du docteur urgentiste a sauvé mon affaire, ainsi qu'un arrêt maladie l'empêchant de faire quoi que ce soit. Cette patronne avait pêté un cable, littéralement. Zéro reconnaissance de sa part. "Mon métier c'est de faire chier les animateurs" disait-elle dès la réunion de préparation du séjour... Certes...
Quant aux perspectives de lutte pour défendre la condition des animateurs, c'est pas évident. C'est triste parceque c'est un milieu assez gauchiste, assez conscientisé. C'est souvent un travail saisonnier alors comment concevoir le syndicalisme ? On tombe sur des réac's aussi, ainsi le webmaster de planetanim.com conseille de chercher un autre travail si on n'est pas satisfait...
Là moi et une copine avons décidé d'écrire un courrier au ministère, histoire qu'il s'occupe un peu de ces séjours mal foutus incriminés... On aura plus d'appui si les autres anim's nous suivent. Mais sinon, c'est une impasse pour se battre. Enfin bon, le système profitera encore longtemps de nos vocations...
Comme tu l'expliques bien, un animateur est légalement un bénévole au service de l'enfant. Un jeune qui adore le contact avec les gosses et pour se faire un peu d'argent de poche ou pour l'expérience, se consacre à l'animation... Y'a quelques bons cotés en plus du simple "militantisme". On rencontre souvent des chics types, on a parfois de la chance en tombant sur un séjour sympa... Mais c'est assez fréquent d'en chier. Je vais raconter mon été où là, j'ai atteint des sommets de manque-de-bol.
J'ai été embauché gràce à une annonce sur internet pour un camp de vacances dans les Hautes Alpes. J'étais assez emballé d'animer un camp pour 4 - 12 ans ; on m'avait dit que les gosses étaient difficiles mais ca m'a pas mis la puce à l'oreille... On a eu plus d'infos en arrivant sur le site : un animateur du séjour précédent a eu des points de suture à la main, les gosses rendaient fous l'équipe, énormément de bastons entre gamins, etc. Lors du premier "cinquième repas" (les réunions journalières avec anim's, directeur, personnel technique parfois) on en a su un peu plus : les gamins (des quartiers nords de Marseille) passent par la CAF et le séjour coute 40euros pour les familles. La quasi-totalité des enfants sont en difficulté scolaire, 40% sont en foyers, une bonne part sont suivis par des assistantes sociales et on en avait même qui étaient suivis par des juges (!). Je suis pas médecin mais certains avaient de gros gros gros problèmes mentaux... Je ne saurais pas mettre un nom dessus mais comme exemple, y'avait un gamin pas foutu de dire autre chose que "pute" et de bouffer avec les sourcils (il avait 12 ans). Des parents te balancent les gosses là comme pour s'en débarasser. A titre anecdotique, on a reçu des lettres nous disant que si leur enfant nous embêtait, on pouvait le ligoter sur une chaise.
La pratique de tous les jours, c'était d'arrêter leurs altercations tout le temps, de crier à en cracher du sang (je ne blague pas), de leur faire prendre un peu de plaisir de temps en temps et de les fatiguer en les faisant bouger un max. C'était dur.
Bref, ce sont des gosses à qui il faut des éducateurs. Et nombreux ! Bilan, qui s'est retrouvé à s'occuper d'eux ? 11 jeunes animateurs dont plus de la moitié étaient stagiaires, rémunérés 17 euros pour une journée commençant à 8 heures du mat' (en étant opérationnel, plus tôt si les gosses sont chiants la nuit) jusqu'à parfois 2 heures du mat' (1h du mat' pour les journées les plus calmes). C'était de l'exploitation. Les anim's, garçons comme filles, ont craqué moralement et physiquement. Moi ca s'est fini à l'hosto pour hypoglycémie sévère (0.4 gr de sucre / l de sang) : je bouffais pas assez par rapport à l'énergie dépensée (je prenais pas de pause pendant la journée, n'ayant pas le besoin de cloper, me retrouvant parfois avec 40 ou 60 gosses pour 2 ou 3 animateurs seulement dans le coin). 6 jours après mon départ, c'est 5 animateurs qui démissionnent par rapport à un travail infaisable et une directrice insupportable qui nous compliquait la tâche. Quelques jours plus tard encore, rajoutez 5 démissions avec un bout du personnel technique (rémunéré 32 euros/j pour un travail un peu plus supportable, mais l'indemnité est toujours dérisoire en comparaison au taf).
Ce qu'il faut savoir aussi, c'est que la directrice a mis sur le dos de l'alcool mon malaise et comptait envoyer un rapport sur moi au ministère jeunesse&sport pour que je sois sur les listes noires (jusqu'à ne plus pouvoir faire de l'encadrement dans mon club de basket). Un coup de fil du docteur urgentiste a sauvé mon affaire, ainsi qu'un arrêt maladie l'empêchant de faire quoi que ce soit. Cette patronne avait pêté un cable, littéralement. Zéro reconnaissance de sa part. "Mon métier c'est de faire chier les animateurs" disait-elle dès la réunion de préparation du séjour... Certes...
Quant aux perspectives de lutte pour défendre la condition des animateurs, c'est pas évident. C'est triste parceque c'est un milieu assez gauchiste, assez conscientisé. C'est souvent un travail saisonnier alors comment concevoir le syndicalisme ? On tombe sur des réac's aussi, ainsi le webmaster de planetanim.com conseille de chercher un autre travail si on n'est pas satisfait...
Là moi et une copine avons décidé d'écrire un courrier au ministère, histoire qu'il s'occupe un peu de ces séjours mal foutus incriminés... On aura plus d'appui si les autres anim's nous suivent. Mais sinon, c'est une impasse pour se battre. Enfin bon, le système profitera encore longtemps de nos vocations...
- Gaby
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- Inscription : 27 Fév 2004, 10:53
par Valiere » 29 Août 2004, 17:16
merci Gaby
Dans un cas comme le tien notamment quand il y a menaces, les syndicats peuvent intervenir...J'aurais pu le faire, au niveau de Jeunesse et sports...
un livre noir sur l'animation élaboré par l'USPAOC CGT ( j'ai donné quelques cas) va sortir bientôt...Il faudrait que tu leur envoies ta contribution, non pour le livre qui est bouclé mais pour l'info...
Nous avions une réunion entre associations membres de la JPA il ya plus d'un an pour évoquer la question des centres de vacances : alors que le dirigeant de la Ligue de l'enseignement disait que les enfants très difficiles des quartiers devaient avoir des centres de vacances à part..Je me le suis payé avec comme argument : il faut une mixité des public mais par contre les centres de vacances doivent aussi disposer d'animateurs permanents ayant une qualification professionnelle et des éducateurs spécialisés...Ta contribution semble aller dans mon sens.
Dans un cas comme le tien notamment quand il y a menaces, les syndicats peuvent intervenir...J'aurais pu le faire, au niveau de Jeunesse et sports...
un livre noir sur l'animation élaboré par l'USPAOC CGT ( j'ai donné quelques cas) va sortir bientôt...Il faudrait que tu leur envoies ta contribution, non pour le livre qui est bouclé mais pour l'info...
Nous avions une réunion entre associations membres de la JPA il ya plus d'un an pour évoquer la question des centres de vacances : alors que le dirigeant de la Ligue de l'enseignement disait que les enfants très difficiles des quartiers devaient avoir des centres de vacances à part..Je me le suis payé avec comme argument : il faut une mixité des public mais par contre les centres de vacances doivent aussi disposer d'animateurs permanents ayant une qualification professionnelle et des éducateurs spécialisés...Ta contribution semble aller dans mon sens.
- Valiere
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