l'URSS un capitalisme d'état?

Marxisme et mouvement ouvrier.

Message par mael.monnier » 22 Août 2004, 20:31

(Jacquemart @ dimanche 22 août 2004 à 17:53 a écrit : Si la bureaucratie soviétique des années trente avait voulu restaurer le capitalisme, elle se serait vraisemblablement heurtée à l'opposition violente et armée des travailleurs. Et c'est d'ailleurs la raison fondamentale pour laquelle elle n'a pas tenté le coup.
:headonwall:

La bureaucratie avait tous les moyens pour le faire vu qu'elle disposait de forces de l'ordre importantes à sa disposition et les fameux goulags... Il suffisait pour cela de laisser oeuvrer la NEP et de ne pas opérer de changement de politique. Seulement ce n'était pas de l'intérêt de la bureaucratie de le faire, car tous les capitaux qui étaient en sa possession se seraient retrouvés entre les mains d'une bourgeoisie, et donc la bureaucratie aurait perdue son pouvoir unique sur le pays (et même si les représentants de la bureaucratie s'étaient arogés à eux seuls le droit de devenir des capitalistes en puissance, cela aurait été un facteur de division de la bureaucratie et cela n'était pas dans son intérêt).
mael.monnier
 
Message(s) : 0
Inscription : 12 Nov 2003, 16:16

Message par Krueger » 22 Août 2004, 20:44

a écrit :Seulement ce n'était pas de l'intérêt de la bureaucratie de le faire, car tous les capitaux qui étaient en sa possession se seraient retrouvés entre les mains d'une bourgeoisie, et donc la bureaucratie aurait perdue son pouvoir unique sur le pays


Je me demande bien qui , d'autre que la bureaucratie, aurait bien pu prendre possesion des capitaux. Par ailleurs, le capital ce n'est pas les usines ou les infrastructures, c'est avant tout un rapport social et là encore qui d'autre que la bureaucratie aurait bien pu le rétablir ? A part une bourgeoisie étrangère à l'issue d'une victoire militaire , je ne vois pas bien qui.

a écrit :(et même si les représentants de la bureaucratie s'étaient arogés à eux seuls le droit de devenir des capitalistes en puissance, cela aurait été un facteur de division de la bureaucratie et cela n'était pas dans son intérêt).


Ils se sont bien entredéchirés, de façon assez sanguinaire, pour des histoires de privilèges de bureaucrates, cà les auraient pas déranger de le faire pour des profits.

Le rétablissement du capitalisme par la bureaucratie dans les années 30 ne serait effectivement heurté à une resistance de population (peut être passive d'ailleurs) mais qui les aurait autrement plus génée.
Krueger
 
Message(s) : 0
Inscription : 14 Déc 2003, 18:30

Message par mael.monnier » 22 Août 2004, 21:09

(Krueger @ dimanche 22 août 2004 à 21:44 a écrit :
a écrit :Seulement ce n'était pas de l'intérêt de la bureaucratie de le faire, car tous les capitaux qui étaient en sa possession se seraient retrouvés entre les mains d'une bourgeoisie, et donc la bureaucratie aurait perdue son pouvoir unique sur le pays


Je me demande bien qui , d'autre que la bureaucratie, aurait bien pu prendre possesion des capitaux. Par ailleurs, le capital ce n'est pas les usines ou les infrastructures, c'est avant tout un rapport social et là encore qui d'autre que la bureaucratie aurait bien pu le rétablir ? A part une bourgeoisie étrangère à l'issue d'une victoire militaire , je ne vois pas bien qui.
Ah bon ? Et comment ont donc fait les capitalistes étrangers pendant la NEP alors ?


a écrit :

a écrit :(et même si les représentants de la bureaucratie s'étaient arogés à eux seuls le droit de devenir des capitalistes en puissance, cela aurait été un facteur de division de la bureaucratie et cela n'était pas dans son intérêt).


Ils se sont bien entredéchirés, de façon assez sanguinaire, pour des histoires de privilèges de bureaucrates, cà les auraient pas déranger de le faire pour des profits.

Oui sauf que les bureaucrates qui seraient devenus des capitalistes auraient forcément perdu par là-même leur qualité de bureaucrates pour passer au statut de bourgeois. Peu à peu une couche bourgeoise se serait formée et son pouvoir économique aurait pu menacé l'édifice de la dictature à parti unique ou tout du moins le dictateur en place (c'est-à-dire Staline qui fut en place de 1924 jusqu'en 1953).

a écrit :Le rétablissement du capitalisme par la bureaucratie dans les années 30 ne serait effectivement heurté à une resistance de population (peut être passive d'ailleurs) mais qui les aurait autrement plus génée.

C'est surtout que la population aurait été de ce fait là beaucoup moins liée au pouvoir politique dictatorial puisque les travailleurs des industries et des campagnes auraient alors pu se tourner vers le privé si la bureaucratie les viraient des usines (souvent pour mettre un terme aux rébellions en éliminant les agitateurs et tous les éléments douteux), la population aurait donc pu ensuite s'allier à la bourgeoisie (qui aurait eu les moyens nécessaires pour l'armement) pour renverser la dictature... Sans le développement d'une bourgeoisie affaiblissant la dictature et pouvant ensuite armer les masses laborieuses, ces dernières ne pouvaient mettre en péril la dictature de la bureaucratie (les masses étant désarmées, surveillées par la police secrète, et jetées dans les goulags en cas de soupçon de désobéissance - passive ou active - ou de rébellion envers le pouvoir, tout mouvement de résistance - même passif - était impossible de sa part).
mael.monnier
 
Message(s) : 0
Inscription : 12 Nov 2003, 16:16

Message par Jacquemart » 22 Août 2004, 21:38

a écrit :C'est surtout que la population aurait été de ce fait là beaucoup moins liée au pouvoir politique dictatorial puisque les travailleurs des industries et des campagnes auraient alors pu se tourner vers le privé si la bureaucratie les viraient des usines (souvent pour mettre un terme aux rébellions en éliminant les agitateurs et tous les éléments douteux), la population aurait donc pu ensuite s'allier à la bourgeoisie (qui aurait eu les moyens nécessaires pour l'armement) pour renverser la dictature... Sans le développement d'une bourgeoisie affaiblissant la dictature et pouvant ensuite armer les masses laborieuses, ces dernières ne pouvaient mettre en péril la dictature de la bureaucratie

La bourgeoisie armant les ouvriers et donnant du travail aux militants révolutionnaires pour affaiblir la bureaucratie...
Bravo Maël, toujours aussi pertinent !
:t3xla:
Avatar de l’utilisateur
Jacquemart
 
Message(s) : 203
Inscription : 16 Déc 2003, 23:06

Message par Endymion » 22 Août 2004, 21:50

a écrit :Ce qui ne change strictement rien sur le fond du raisonnement


Ce genre d'erreur, répété trois fois (ainsi que dans la 1ere version du texte de congrès présenté par la majorité de LO fin 2003 !), est témoin d'une pensée qui sur ce sujet a tendance à être quelque peu fossilisée chez les trotskistes.

Après, bien sûr le capitalisme a pris et peut prendre différentes formes, et l'URSS a représenté une forme particulière de capitalisme.
On peut être en désaccord avec cette vision des choses : mais de là à dire que ce n'est pas le capitalisme aujourd'hui en Russie... :altharion: Je renvoie là-dessus au texte de la fraction sur le sujet (publié je crois dans Lutte de classe de décembre 2003).
Endymion
 
Message(s) : 0
Inscription : 20 Mars 2004, 17:14

Message par Jacquemart » 22 Août 2004, 22:04

Ce n'est pas une erreur, du moins pas dans le sens où tu sembles le croire.
Parler de société "soviétique" à propos de la Russie de Staline ou de Brejnev, c'était aussi une erreur, dans le sens où cela faisait belle lurette que les soviets n'en étaient plus. Mais quel terme utiliser, alors ? Société "dite soviétique" ?
Aujourd'hui, il est sans doute encore moins approprié qu'avant d'utiliser le terme.
Mais le terme d'"ex-soviétique" n'est pas beaucoup plus juste. Car il sous-entend, justement, que la société a qualitiativement changé en Russie par rapport à la période précédente, ce qui n'est pas si vrai que cela.
C'est cela le problème avec les étiquettes : elles ne sont jamais totalment appropriées.
D'ailleurs, à propos du rétablissement prétendument achevé du capitalisme en Russie, si tu ne crois pas LO, tu pourrais consulter les multiples complaintes de la bourgeoisie occidentale à ce sujet. Il y en a plein les colonnes des journaux économiques. Eux, pourtant, ne sont pas paralysés par des analyses trotskystes fossilisées... Mais ils se plaignent néanmoins, invariablement, du fait qu'en Russie, malgré la bonne volonté affichée des dirigeants, il n'y a pas moyen de faire des affaires normalement.
Pour ceux qui veulent discuter sur la réalité sociale, et pas uniquement sur des formules, il y a les nombreux CLT que LO a consacrés à l'évolution de la société russe depuis quelques années, en particulier le dernier, qui insistait précisément sur ces aspects.
Mais de toutes manières, il sera sans aucune doute difficile d'expliquer que le capitalisme n'est pas encore rétabli en Russie à quelqu'un qui pense qu'il l'a été depuis les années vingt, voire qu'il n'en a jamais été éradiqué.
Avatar de l’utilisateur
Jacquemart
 
Message(s) : 203
Inscription : 16 Déc 2003, 23:06

Message par logan » 22 Août 2004, 22:43

a écrit :Les fonctions exercées par le capitaliste ne sont rien de plus que les fonctions, exécutées avec conscience et volonté, du capital - valeur qui se valorise en absorbant du travail vivant. Le capitaliste fonctionne uniquement comme personnification du capital, capital-personne, de la même manière que l'ouvrier n'est que le travail personnifié, travail qui appartient à l'ouvrier pour ce qui est de la peine et de l'effort, et au capitaliste pour ce qui est de la substance créatrice de richesses toujours plus grandes; bref, l'ouvrier se manifeste comme élément incorporé au capital dans le procès de production, comme son facteur vivant, variable
(Marx, Chapitre inédit du capital)


Le capital ce n'est pas la bourgeoisie. La bourgeoisie capitaliste n'est que la personnification du capital. Mais ce n'est pas son essence.
Mais alors quelle est L'essence du capital?
a écrit :Le procès de travail lui-même n'est toutefois que le moyen du procès de valorisation, tout comme la valeur d'usage du produit n'est que le support de sa valeur d'échange. L'auto-valorisation du capital, création de plus-value est donc l'âme, le but et l'obsession du capitaliste, l'impulsion et le contenu absolus de son action (idem)


L'essence du capital c'est son auto-valorisation. C'est à dire l'extraction croissante de plus value et son accumulation. Son essence c'est le salariat généralisé suant une plus value croissante.

L'état russe dans les années 20 ne peut se passer du salariat généralisé.
Il rétablit le salaire aux pièces, érige le stakhanovisme en modèle.
A quoi a-t-on à faire si ce n'est à une économie fonctionnant sur la base capitaliste de l'extraction et de l'accumulation de la plus-value?
Qu'il y ait des bourgeois ou non est secondaire, cela concerne seulement la forme que revêt le capital mais pas son essence.

La société russe fonctionnant sur les bases économiques du capital a généré un état approprié : l'état stalinien, fait de coercition, de violence, de salaires réduits au minimum vital et d'annexions.
logan
 
Message(s) : 440
Inscription : 23 Fév 2004, 13:47

Message par logan » 23 Août 2004, 09:18

a écrit :Non, justement, pas quel que soit le sens qu'on donne à ce mot. Et surtout, si l'on parle réalités et non définitions, une telle société n'équivaut pas forcément, du point de vue de la situation objective des travailleurs, à une société bourgeoise normale. Voilà pourquoi on peut choisir de continuer à l'appeler "ouvrière", c'est-à-dire à vouloir y défendre ce qui reste d'"ouvrier" dans ses structures.


Mais quelles "structures" restent les acquis de l'état ouvrier?

La planification?
Le premier plan quinquennal apparaît en 1928 sous l'impulsion de Staline.

L'étatisation?
Elle est complète en 1928 sous l'impulsion de Staline. A cuba aussi il y a étatisation et pourtant LO ne l'appelle pas état ouvrier.

Le monopole du commerce extérieur?
A Cuba aussi il existe. Et pourtant LO ne l'appelle pas état ouvrier.

Mais alors ce sont les organes de la révolution ouvrière de 1917 qui seraient "ouvriers"?
Les soviets ne jouent plus aucun role, en tout cas pas le role de pouvoir politique des travailleurs.

En réalité il n'y a pas de structures en soi qui seraient les garants de l'état ouvrier.
La nature de l'état dépend entièrement de la domination politique de la classe ouvrière. Quand l'état se construit sur des bases économiques capitalistes, sur le salariat généralisé, la domination politique de la classe ouvrière est évidemment entamée et en lutte avec d'autres forces sociales. La contre révolution a déjà eu lieu en URSS il y a bien longtemps. Le dépérissement des soviets, La chasse aux trotskistes et les procès de Moscou ont consacré la naissance du nouvel état capitaliste.
logan
 
Message(s) : 440
Inscription : 23 Fév 2004, 13:47

Message par logan » 23 Août 2004, 09:26

a écrit :Notre capitaliste débutant qui achète de la force de travail pour exploiter son affaire, c'est-à-dire qui loue un ouvrier, paye donc à cet ouvrier la valeur journalière intégrale de sa force de travail lorsqu'il lui paye une somme d'argent qui représente également six heures de travail. Or, dès que l'ouvrier a travaillé six heures au service du capitaliste débutant, il a intégralement remboursé celui-ci de sa dépense, de la valeur journalière de la force de travail qui a été versée. Mais l'argent ne serait pas transformé par là en capital, il n'aurait pas produit de plus-value. C'est pourquoi l'acheteur de la force de travail a une opinion tout à fait différente sur la nature du marché qu'il a conclu. Qu'il suffise de six heures de travail pour maintenir l'ouvrier en vie pendant vingt-quatre heures, n'empêche nullement celui-ci de travailler douze heures sur vingt-quatre. La valeur de la force de travail et la mise en valeur de cette force dans le processus du travail sont deux grandeurs différentes.
L'homme aux écus a payé la valeur journalière de la force de travail, donc son utilisation pendant la journée, le travail de la journée lui appartient aussi. Si la valeur que son utilisation crée en une journée est le double de sa propre valeur journalière, c'est une chance particulière pour l'acheteur, mais selon les lois de l'échange des marchandises, ce n'est absolument pas une injustice envers le vendeur. L'ouvrier coûte donc chaque jour à l'homme aux écus, d'après notre hypothèse, le produit en valeur de six heures de travail, mais il lui fournit chaque jour le produit en valeur de douze heures de travail. Différence au profit de l'homme aux écus : six heures de surtravail impayé, un surproduit impayé dans lequel est incorporé le travail de six heures. Le tour est joué. La plus-value est produite, l'argent transformé en capital.
(Engels, Anti Duhring 1878)


Engels résume la nature du capital
Voilà un petit jeu : Remplacer les mots en rouge par le mot "l'état".
Le capitaliste achète la force de travail en donnant un salaire au travailleur. Le travailleur crée plus de richesse qu'il n'en consomme. Le capitaliste accumule le surplus, la plus value et ainsi nait le capital.
Dans l'ex URSS le "capitaliste" ou "l'homme aux écus" achetant la force de travail c'est l'état.
logan
 
Message(s) : 440
Inscription : 23 Fév 2004, 13:47

Message par logan » 23 Août 2004, 09:36

a écrit :II. - RÉVOLUTION CAPITALISTE. -

D. - Reconnaissance partielle du caractère social des forces productives s'imposant aux capitalistes eux-mêmes. Appropriation des grands organismes de production et de communication, d'abord par des sociétés par actions, puis par des trusts, ensuite par l'État. La bourgeoisie s'avère comme une classe superflue; toutes ses fonctions sociales sont maintenant remplies par des employés rémunérés.

III. - RÉVOLUTION PROLÉTARIENNE. ...
(Engels, idem, socialisme, 2ème partie)


Engels dresse le schéma du développement économique de l'humanité.
A la fin de la domination capitaliste, et AVANT même la révolution prolétarienne la bourgeoisie est une classe superflue
Ce n'ets pas moi qui l'écrit c'est Engels reprenant à 100% Marx. Les fonctions sociales de la bourgeoisie sont remplies par des salariés.
Quelle meilleure analyse pour comprendre la nature de l'URSS?
L'URSS n'a pas de bourgeoisie. La bourgeosie est une classe superflue à un certain niveau de développement.
Ses fonctions sont remplies par l'état qui organise la production, décide de la répartition et accumule la plus value. L'état est aux mains de la bureaucratie.
On a un état bourgeois sans bourgeoisie. Un état fonctionnant clairement sur les bases du capitalisme.
Ce que prouve le maintien du salaire, indispensable au capitalisme et incompatible avec le socialisme.

Dans leur lucidité Marx et Engels montrent les tendances inévitables du capitalisme :
1/ La bourgeoisie n'est plus indispensable à l'existence du capital
2/ Appropriation des grands organismes de production et de communication, d'abord par des sociétés par actions, puis par des trusts, ensuite par l'État

L'ex URSS c'est une société ou le capitalisme revêt sa dernière forme possible, son stade ultime avant le socialisme. Les entreprises appartiennent à l'état, la bourgeoisie n'existe plus. L'état agit comme un capitaliste monopoliste. il s'appropprie les moyens de production. Il achète la force de travail des ouvriers et accumule le capital à l'échelle de l'état tout entier.
logan
 
Message(s) : 440
Inscription : 23 Fév 2004, 13:47

PrécédentSuivant

Retour vers Histoire et théorie

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 3 invité(s)