La rentrée politique vue par l'Huma.

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Message par mael.monnier » 28 Août 2004, 00:40

(Pascal @ jeudi 26 août 2004 à 11:07 a écrit :
(mael.monnier @ mardi 24 août 2004 à 23:27 a écrit :En outre lutter pour une augmentation des salaires est stupide en soi car cette hausse des salaires sera annulée à terme par la hausse des prix à la consommation, par une réduction des embauches et par une augmentation des délocalisations qui feront remonter le chômage... 

Maël,

Le discours qui consiste à dire "lutter pour une augmentation de salaire est stupide parce que l'augmentation de salaire sera annulée par la hausse des prix", outre que c'est un de ces discours qui, dans les faits, pousse à la passivité des travailleurs, est complètement faux. Au XIXème déjà, certains socialistes tenaient ce genre de discours, et Marx y a répondu dans sa brochure "salaire, prix et profits".

Tu peux la lire :
http://www.marxists.org/francais/marx/work.../km18650626.htm

Tu verras, il n'y a aucune "loi d'airain" qui voudrait que la hausse des salaires implique automatiquement la hausse des prix.
Le problème, c'est que l'on n'est plus au XIXe siècle où le capitalisme était dans sa phase de développement. Entre temps, les économies nationales sont devenues de plus en plus interdépendantes et la guerre économique entre nations s'est accentuée. En outre, Karl Marx prend l'exemple d'une augmentation de salaires qui est survenue lors de progrès de productivité importants en Angleterre, qui était à l'avant garde de la révolution industrielle ce qui lui offrait une certaine suprématie sur le reste du monde. Ces gains de productivité font que le salaire relatif augmente moins vite que le salaire absolu, ce qui modère la baisse du taux de profit et aurait donc pu rendre inutile une répercussion de la hausse des salaires sur les prix (c'est là une supposition que je fais, Marx n'en parlant pas, et il faudrait donc le vérifier).

Toutefois, en 1874 survient un krach économique financier en Europe qui marquera le début d'un certain déclin économique de l'Angleterre, déclin lié en partie aux salaires élevés (qui augmenteront de 40% entre 1870 et 1900) qui renchérissent les produits industriels anglais (Source : http://www.ac-versailles.fr/PEDAGOGI/ses/C...esCorot/RI8.htm). On peut donc noter que l'impact d'une hausse des salaires n'est pas la même suivant le contexte économique.

Maintenant, nous ne sommes plus en phase de développement du capitalisme, mais en phase de décadence, qui se caractérise par un rôle croissant de l'Etat dans l'économie. Comme le note le CCI dans Révolution Internationale du mois de mai 2004, "face au retour du chômage massif à partir des années 1970, la réponse de la bourgeoisie avait consisté à prendre des mesures capitalistes dites de "l'Etat providence" (notamment à travers des modalités plus avantageuses d'accès à la retraite dans certains pays) mais qui constituaient un non sens du point de vue économique, à tel point qu'aujourd'hui ces mesures constituent une des principales causes de l'incommensurable dette publique". Ce qui amène maintenant la bourgeoisie à démanteler cet Etat providence en cassant la Sécu, les services publics et le système de retraites.

Dans la situation économique actuelle, un hausse des salaires entraînerait donc une hausse du coût de la main-d'oeuvre, donc une baisse du taux de profit qui amènerait principalement les entreprises à augmenter de manière générale leurs prix afin de restaurer leurs profits, à accroître le temps de travail de leurs salariés sans compensations salariales, à délocaliser dans des pays où le coût de la main-d'oeuvre est à plus bas prix, ou à remplacer des salariés par des machines.

a écrit :Quant à dire que la hausse des salaires entraînerait une baisse des embauches, c'est tout à fait le discours du MEDEF, discours qui voudrait nous faire croire que pour faire baisser le chômage, il faut accepter la dégradation de nos conditions de vie et de travail. Il faut aller au bout de ta pensée : si l'augmentation des salaires a pour conséquence l'augmentation du chômage, alors on peut inverser la proposition, et on devrait dire, comme le MEDEF, que pour faire baisser le chômage il faut faire baisser les salaires. Ce qui est bien entendu complètement faux : il y a des milliers d'exemples de boîtes où, avec le chantage aux licenciements, les patrons ont imposé des baisse de salaires, et qui ont finalement licencié, des boites qui font des bénéfices énormes et qui annoncent des plans de licenciements (comme Michelin récemment). Et d'une façon générale, tu vois bien que depuis les années 80, le prix de notre force de travail ne cesse de baisser, alors que le chômage continue d'augmenter.

Oui, effectivement. Mais ce n'est pas parce que cela est faux, que l'inverse est vrai.

a écrit :Il est amusant de constater d'ailleurs, que depuis que les capitalistes existent, ils ont toujours tenu des discours comme quoi toute amélioration des conditions de vie de la classe ouvrière entraînerait une catastrophe économique et une hausse du chômage. L'interdiction du travail des enfants, la journée de huit heures, les congès payés, tout cela, si on lit la prose patronale de l'époque, aurait été impossible. Et pourtant ! La classe ouvrière a bien réussit à arracher ces améliorations au patronat. Que des patrons tiennent ce discours, c'est bien compréhensible, cela fait partie de la lutte des classes. Mais que des gens, qui par ailleurs se proclament du côté des travailleurs, se transforment en caisse de résonnance des arguments patronaux, ça c'est "stupide en soi".

A propos de 1936, il est à noter que cela entraîna justement une hausse des prix qui annula les effets de l'augmentation des salaires. Je cite le Quid :
a écrit :1937: le Front populaire élu en 1936 (Léon Blum) relève les salaires horaires de 25 % en un an, impose la semaine de 40 h avec 2 semaines de congés payés. Le pouvoir d'achat des salaires horaires monte d'abord de 26 % en 2 ans, mais la production ne suivant pas (par suite de la limitation de la durée du travail), les années 1938, 1939 et 1940 enregistrent une baisse du pouvoir d'achat égale aussi à 26 %.
(Source : http://www.quid.fr/2000/Q053460.htm)

a écrit :Tout ton discours est celui de la résignation, un appel à la passivité, même s'il est marqué par un discours pseudo-radical.  Tu ne dis pas autre chose que "les patrons sont de toute façon les plus forts, on ne peut rien faire, c'est bien triste ma pauvre dame". Bien sûr, tout en refusant la lutte pour les augmentations de salaire, tu dis que la seule perspective c'est de faire la révolution. Nous sommes, je pense, tous d'accord sur ce forum là-dessus : notre but c'est la révolution sociale, l'expropriation des capitalistes, la socialisation des moyens de production, etc, etc.

Mon discours n'est pas un appel à la passivité, mais à une prise de conscience du fait que le capitalisme ne peut plus avoir le caractère progressiste qu'il avait auparavant et qui était marqué par une amélioration des conditions de vie. Et face à cela, on ne peut justement pas rester les bras croisés.

a écrit :Maintenant, comment renforcer la combativité, l'organisation et la conscience des travailleurs ? En préchant la révolution comme les témoins de Jéhovah attendent la venue du messie ? Ou en participant, et en organisant, si on le peut, les combats quotidiens de notre classe ? En reprenant tes "arguments", alors il n'aurait pas fallu se battre contre la loi Fillon, il n'aurait pas fallu tenter de lutter contre la casse de la Sécu, il ne faudrait pas lutter contre les licenciements... il faudrait finalement juste constater la dégradation de nos conditions de vie ?

Si, bien sûr que si qu'il fallait se battre contre cela. Dans le contexte économique actuel, si on avait empêché toutes les casses sociales qui ont été faites, si on avait ramené les retraites aux 37.5, etc., cela n'aurait pu que renforcer la crise du capitalisme ce qui aurait montré par là en quoi le capitalisme est bien une impasse et qu'il faut donc changer de système.

a écrit :Ne pas donner d'illusions aux travailleurs ? Je ne vois pas en quoi c'est "donner des illusions" que d'expliquer que, oui, la classe ouvrière a les moyens de se battre et de créer un rapport de force contre la bourgeoisie, aujourd'hui pour améliorer ses conditions de vie ou refuser la casse sociale, mais aussi pour renverser le capitalisme.

Améliorer nos conditions de vie ? On ne le peut plus justement et on assiste à une détérioration de nos conditions de vie sans précédent avec la crise que connaît actuellement le système capitaliste. La seule issue pour améliorer nos conditions de vie, c'est la révolution...

a écrit :Avec ton discours, tu peux finir bureaucrate à la CFDT, et signer un accord pour passer aux 36 heures payées 35. Tu expliqueras alors bien qu'il n'y avait pas le choix, qu'il faut mieux "assouplir le temps de travail" que de risquer une délocalisation... C'est sûr que tu ne donneras aucune "illusion", mais tu seras dans le camp du patronat, pas dans celui des travailleurs.

Parce que tu crois qu'on pouvait sincèrement se défendre à l'échelle d'une entreprise comme chez Bosch ou chez le volailler Doux ? Parce que tu crois que les salariés de chez Bosch ou de chez Doux auraient pu se mettre en grève et ne pas signer ces accords ?

En tout état de cause, le problème actuel c'est les délocalisations et le dumping social qui sont les racines des maux que l'on connaît ensuite : austérité salariale et chômage. Et pour lutter contre ces maux, il faut lutter contre radicalement (en s'en prenant aux racines) et non en s'en prenant aux effets. Alors faire une pétition pour une augmentation des salaires comme la mère Buffet est doublement inefficace : 1/ une pétition a peu de chance de servir à quelque chose ; 2/ s'en prendre à l'austérité salariale c'est ne pas lutter contre les racines de ce problème et donc c'est voué à l'échec. Ce contre quoi il faut lutter, c'est contre les délocalisations et le dumping social. Là on peut obtenir des résultats.
mael.monnier
 
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Message par com_71 » 28 Août 2004, 08:51

(mael.monnier @ samedi 28 août 2004 à 01:40 a écrit : faire une pétition pour une augmentation des salaires comme la mère Buffet ...
Pépé Maël, tu es un fieffé réactionnaire.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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com_71
 
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Message par mael.monnier » 28 Août 2004, 22:02

(com_71 @ samedi 28 août 2004 à 09:51 a écrit :
(mael.monnier @ samedi 28 août 2004 à 01:40 a écrit : faire une pétition pour une augmentation des salaires comme la mère Buffet ...

Pépé Maël, tu es un fieffé réactionnaire.
:altharion:

Etre taxé de réactionnaire parce que j'estime que les conditions économiques ne le permettent pas et que cette hausse des salaires ne nous apporteraient rien au final voire engendrerait une diminution de nos conditions de vie (à cause d'une chute de la compétitivité française)... :altharion:

En attendant, vous n'avez rien répondu vis-à-vis des objections que j'ai faite dans mon dernier message pas plus que vous n'avez répondu à ma question sur le cas de Bosch et Doux...
mael.monnier
 
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Message par Péricles » 29 Août 2004, 00:10

a écrit :cette hausse des salaires ne nous apporteraient rien au final voire engendrerait une diminution de nos conditions de vie (à cause d'une chute de la compétitivité française)...


T'écris les discours de Sellière maintenant? :w00t:
Péricles
 
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Message par Valiere » 29 Août 2004, 09:56

C'est un peu dur comme réaction mais c'est vrai Mael et tu le sais que les revendications salariales sont importantes.
Valiere
 
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Message par Péricles » 29 Août 2004, 10:13

Non, Mael à raison!
Nos entreprises sont en pertes de vitesses. Les 35h, le(s) smic(s), le RMI, les retraites, la Sécu, constituent des carcans qui entravent la compétitivité de nos entreprises. :hinhin:
Vive la baisse des salaires! A bas les droits ouvriers! Vive la libre entreprise! :sygus:
Péricles
 
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Message par Valiere » 29 Août 2004, 10:26

Vive l'ironie...à petite dose
Valiere
 
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Message par Péricles » 29 Août 2004, 10:31

Bon je rigole. :-P Mais quand même le passage sur la compétitivité des entreprises c'est abusé.
Péricles
 
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Message par Valiere » 29 Août 2004, 10:49

ce qui montre encore une fois que nous aussi on est influencé par nos adversaires.
Quand je dis nous, je "m'englobe".
Valiere
 
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