a écrit :]Perrier : Nestlé à l’offensive contre la CGT et contre les travailleurs
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Malgré l’annonce par la CGT de la levée de son opposition à son plan de restructuration, la direction du géant de l’agro-alimentaire Nestlé -qui exploite en France les usines d’embouteillage des eaux minérales Perrier, Vittel, Contrex, Quézac, ainsi que la Verrerie du Languedoc- vient de déclarer que cela n’était absolument pas suffisant.
Après arbitrage de Sarkozy et en échange de ce recul de la CGT, Nestlé avait pourtant accepté de ne pas fermer ses usines. Il semblait aussi s’engager à procéder aux investissements nécessaires pour relancer l’usine Perrier de Vergèze dans le Gard et pour moderniser la Verrerie du Languedoc, qui emploie 520 salariés. Mais cela signifiait toujours le maintien de 1047 départs en préretraite d’ici à 2007, sur un effectif total de 4100 personnes. Ces départs à 55 ans ne devaient être compensés que par 276 embauches, soit 771 suppressions nettes d’emplois.
Accepté par la CFDT et la CGC, ce projet était bloqué depuis juillet dernier par le refus de la CGT, syndicat majoritaire, appliquant les possibilités que lui offrait la loi Fillon de s’opposer au plan. Contre ce refus, Nestlé menait campagne, pratiquant le chantage à l’emploi, menaçant de fermer ses usines, de les vendre, de les filialiser, de liquider l’usine de Vergèze dans laquelle la CGT est majoritaire à 85%, etc. Pour refuser les suppressions d’emplois prévues dans le plan de la direction, la CGT était désignée comme la responsable de licenciements plus massifs encore et même de la liquidation totale des entreprises dont Nestlé brandissait la menace. La direction du trust tablait sur la crainte des salariés de perdre tout, en refusant un compromis. Elle misait sur la pression des salariés sur la CGT.
Finalement, lundi 27 septembre, tout en réaffirmant son désaccord avec le projet de la direction et tout en déclarant qu’il n’était donc pas question pour elle de s’engager à aider à sa réalisation, la CGT levait son opposition au plan de restructuration. Mais loin de se contenter de ce recul, les dirigeants du trust exigent maintenant que la CGT s’engage dans la mise en œuvre de leur plan de suppression d’emplois. Faute d’un tel engagement, le trust a annoncé qu’il annulerait tous ses engagements d’investissements, agitant de nouveau les menaces de fermetures et de filialisations de ses usines.
Le trust Nestlé (à la santé florissante puisqu’il a annoncé près de 4 milliards d’euros de bénéfices en 2003 et qui compte parmi ses principaux actionnaires Liliane Bettencourt de L’Oréal) a programmé la destruction de centaines d’emplois. Aujourd’hui, non seulement il exige l’accord de toutes les organisations syndicales pour réaliser son plan mais il veut mettre à ses pieds ceux qui s’opposent à lui, et en particulier la CGT, en les amenant à cautionner ses infamies auprès des travailleurs. Un responsable de la CGT déclarait: «On a fait un pas en avant et Nestlé fait trois pas en arrière». Il aurait pu dire: «On a fait un pas en arrière et Nestlé a fait trois pas en avant» contre les travailleurs.
Lucienne PLAIN
a écrit :Le 12 septembre, à la Fête de L'Humanité, Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT, a souhaité " que les organisations syndicales de salariés fassent front uni pour dire qu'il y a une ligne blanche à ne pas dépasser et décider ensemble de se mobiliser pour défendre le droit au travail ".
Gestion sociale, publication " réservée aux dirigeants ", souligne que l'appel de Bernard Thibault vise pour commencer à " renouer contact avec son homologue de la CFDT ". Mais, au-delà, " Thibault se défend de tout changement de cap ". Son " front uni n'est pas un concept nouveau, mais une modalité du syndicalisme rassemblé ". Ce que veut dire concrètement cette déclaration, on va le voir plus loin dans l'action pratique des dirigeants de la CGT face au coup de force de la multinationale contrôlant Perrier.
[...]
OUVRONS à présent le dossier de la " vente " Perrier, menace avancée par la direction de la multinationale Nestlé-Waters France. Au mois d'août, La Tribune a indiqué que, "Perrier n'atteignant pas le ratio de productivité exigé par le plan de réduction des coûts lancé par Nestlé ", des objectifs lui avaient été assignés par la direction : " Doubler la production d'ici 2007, améliorer la rentabilité, investir 23 millions d'euros, plus 8 millions d'euros dans les différentes usines. "
On pourrait penser que ces investissements auraient pu être financés par une croissance " harmonieuse ", qui, selon La Tribune, se mesure à un résultat d'exploitation en forte hausse (+ 32,4 %) et à un bénéfice net par action de 3,79 euros (+ 31,8 %).
Nous avons là, n'est-ce pas, une illustration nette et claire de ce qu'une surexploitation forcenée permet aux capitalistes d'obtenir des résultats financiers spectaculaires. C'est de lutte de classe qu'il s'agit, une lutte de classe dans laquelle, à juste titre, dès le départ, les syndicats CGT et Force ouvrière ont refusé les propositions de Nestlé-Waters de suppression de 1 047 emplois en France (dont 356 à Vergèze, Gard, le siège de Perrier) sur un total de 4 500 emplois.
Jour après jour, la pression n'a cessé de s'exercer sur les organisations syndicales. On lit dans Midi lnfos (22 septembre 2004) : " Nicolas Sarkozy aurait rapidement compris que Nestlé ne reviendrait pas sur l'accord de gestion prévisionnelle et de départs anticipés signé en juillet par la CFDT et la CF-CGC. " L'idée était de débloquer cet accord en offrant à la CGT la possibilité de sortir de la nasse dans laquelle elle s'était mise", explique un proche du ministre. Une rencontre est donc prévue avec la CGT en préfecture du Gard. Et quelques heures après l'entrevue de Bercy, le préfet du Gard, Jean-Pierre Hugues, et une collaboratrice de Nicolas Sarkozy sont descendus à Nîmes pour dévoiler les grandes lignes de ce plan aux représentants de la CGT.
Auparavant, le ministre avait eu personnellement au téléphone le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, lequel a ensuite appelé le syndicat de Vergèze. Devant les grilles de la préfecture, Jean-Paul Franc, de la CGT de Perrier, s'est félicité du "rôle joué par lé ministre pour permettre le retour au dialogue". "
Peut-on croire un instant que le ministre Sarkozy, qui, via Bernard Thibault, a fait pression sur les dirigeants syndicaux de Perrier, a ainsi obtenu l'abandon du plan ? On lit dans le même journal : " La direction de Nestlé- Waters France n'entend pas renoncer à son projet consistant à créer quatre filiales. " De toute façon, on ne pourra pas l'empêcher ", commentait hier Jean-Paul Franc, dirigeant CGT, la filialisation étant maintenue. "
PEUT-ON croire un seul instant que cette politique, qui exprime clairement le contenu du syndicalisme d'accompagnement, du " syndicalisme rassemblé ", permettra d'aider à la résistance des travailleurs et des organisations ?
Peut-on croire un seul instant qu'accompagner les restructurations, les suppressions d'emplois, les privatisations, empêchera le MEDEF, l'Europe et le FMI d'exiger toujours plus encore dans l'exploitation des travailleurs ? Peut-on croire un seul instant qu'accompagner cette politique permettra de garantir l'indépendance des syndicats par rapport au patronat, aux gouvernements, à tout parti ?
Aucun travailleur ne peut croire que le ministre des Finances, Nicolas Sarkozy, candidat UMP à la présidence de la République en 2007, marche pour défendre les intérêts des salariés. On a en mémoire sa déclaration du 16 septembre à Europe 1, avant qu'il se félicite de la position prise sous la pression de Thibault : "Dans l'affaire Nestlé, le jusqu'au-boutisme d'une organisation syndicale plonge les salariés dans l'angoisse et donne une image de notre pays qui décourage un certain nombre d'investisseurs. "
Donc, soumis à cette pression de Thibault, relayant les exigences de Sarkozy, du MEDEF, de la direction de Nestlé et de l'Union européenne, le syndicat CGT de Perrier a levé son droit d'opposition.
N'a-t-on pas là l'expression claire, pratique, d'une politique qui trouve ses racines ailleurs que dans la lutte de classe indépendante, c'est-à-dire que dans la défense inconditionnelle des droits et garanties des travailleurs ?
Et à quoi cela a-t-il servi ? Qu'a répondu la direction de Nestlé-Waters au fait que le syndicat CGT ait levé son droit d'opposition sur directive de Thibault ? On lit dans Le Parisien (28 septembre) : " La semaine dernière, les pourparlers avaient repris sous l'égide de Bercy. Le pacte paraissait clair. Nestlé gardait ses usines en France, à condition de faire passer son plan, et le géant de l'eau promettait des dizaines de millions d'euros d'investissements pour son fleuron. Tout semblait bien ficelé. Jusqu'à hier soir. En fait, la direction de Nestlé paraît ne pas avoir " digéré " le discours ambigu de la CGT (...). "
La direction de Nestlé exige la capitulation sans conditions des organisations syndicales, le ralliement sans conditions aux seuls intérêts du patronat. Et cette question est la question clé à laquelle sont confrontées les organisations syndicales à tous les niveaux. Et cette question ne saurait avoir de réponse ambiguë, car, de toute façon, dans la situation sans issue dans laquelle se débat ce pays, le MEDEF, le gouvernement n'ont qu'un seul but : casser tout ce que la classe ouvrière a pu conquérir dans sa lutte de classe pour la défense de l'indépendance et de la démocratie.
a écrit :Parce que tu fustigerais les mecs de la CGT à Perrier après la lecture (?) de 3 articles ? Moi j'oserais pas, en tout cas pas pour les comparer à Chérèque et consorts. Même si ce n'était qu'une bande de bureaucrates, vu la situation, je ferais marcher mes doigts dans le vide un petit moment et j'attendrais d'avoir un peu plus d'info avant de porter un jugement sur ce forum.
a écrit :Après, si j'etais sur place, j'aurais peu etre à redire sur la manière dont la barque est menée, mais vraiment, devant son ecran d'ordinateur, c'est indecent...
a écrit :Un chantage au plus haut niveau
Après avoir subi les pressions de Sarkozy, de Nestlé, de la presse, voire peut-être de la confédération, la CGT-Perrier a accepté de lever son opposition au « plan social ». Sarkozy a foncé. Contactant directement Nestlé et Bernard Thibault, il annonce lui-même que Nestlé préservera l’entreprise si la CGT accepte le plan social se traduisant par 1 047 départs en préretraites sur 4 100 emplois. Dans le Gard, tout le monde a un voisin, un ami qui travaille à Perrier ou à la verrerie, principales entreprises du département. Beaucoup rappellent que les projets de démantèlement ont commencé avec l’OPA de Nestlé sur Perrier, il y a dix ans : « Il s’agissait avant tout d’éliminer, en l’absorbant, le principal concurrent au développement du marché de l’eau en bouteille. » D’autres insistent sur les liens de M. Girardot, PDG de Nestlé Waters France et ancien directeur de la source de Vergèze : « Il a des amis personnels au gouvernement. » Un retraité, qui avait d’importantes responsabilités syndicales, insiste sur le fait que, contrairement à l’opinion entretenue par les médias, ce n’est pas simplement le plan social qui a été refusé par la CGT, mais un ensemble de mesures, « le projet Globe », qui remettait en cause le statut avancé que les salariés avaient conquis depuis des décennies. Ce projet comprenait l’externalisation de services, la délocalisation du centre administratif à Francfort. Le plan social actuel ne serait qu’un début. Le personnel employé sur ces activités passerait alors sous la responsabilité des entreprises sous-traitantes. Il perdrait son statut et la convention collective Perrier. L’enjeu est donc énorme dans le bras de fer entre Nestlé et la CGT, très majoritaire (55% sur le groupe). Certains ont dit que la CGT, si elle accepte de lever son opposition en échange d’un investissement, « s’en sortira la tête haute ». Mais c’est surtout Sarkozy qui redore son blason dans cette affaire, alors que Nestlé se contente de vagues promesses. La confédération CGT, après avoir mis en garde ses syndicats sur les dangers d’utiliser son droit d’opposition (car cela rejette à la fois ce qui est négatif et ce qui est... positif), n’a lancé aucune campagne nationale, ni sur Perrier, ni sur les licenciements. Son syndicat est donc isolé. Dans la région, des comités de soutien très larges, dans chaque ville ou village, « contre les licenciements dans un groupe qui fait des profits » sont possibles, afin de soutenir la mobilisation.
Correspondant
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