par Proudhon » 11 Oct 2004, 09:00
Dans le concert anti-derridien, j'apporterais une petite note discordante.
D'accord sur la forte présence d'une "réthorique de l'obscurité" chez Derrida, d'un parfum d'obscurisme qui a contribué à son succès mondain. C'est net dans son livre "Spectres de Marx" (Galilée, 1993), avec tout une série de délires sur "la spectrologie" et autres fadaises lorgnant du côté d'Elisabeth Tessier. Mais...
On trouve aussi chez Derrida des "perles" plus suggestives qui invitent à la réflexion. Par exemple, dans le même "Spectres de Marx" :
. "Eh bien, ce qui reste aussi irréductible à toute déconstuction, ce qui demeure aussi indéconstructible que la possibilité même de la déconstruction, c'est peut-être une certaine expérience émancipatoire; c'est peut-être même la formalité d'un messianisme structurel, un messianisme sans religion, un messsianique, même, sans messianisme, une idée de la justice - que nous distinguons toujours du droit et même des droits de l'homme - et une idée de la démocratie - que nous distinguons de son concept actuel et de ses prédicats déterminés aujourd'hui." (p.102) :blink:
. "Au-delà même de l'idée régulatrice dans sa forme classique, l'idée, si c'en est encore une, de la démocratie à venir, son "idée" comme événement d'une injonction gagée qui commande de faire venir cela même qui ne se présentera jamais dans la forme de la présence pleine, c'est l'ouverture de cet écart entre une promesse infinie (toujours intenable au moins parce qu'elle appelle le respect infini de la singularité et de l'altérité infinie de l'autre tout autant que de l'égalité comptable, calculable et subjectale entre les singularités anonymes) et les formes déterminées, nécessaires mais nécessairement inadéquates de ce qui doit se mesurer à cette promesse." (p.111) :headonwall:
On y trouve (toujours dans un langage derridien qui flirte avec l'obscurisme) :
* une critique implicite des limites de "la déconstruction" comme relavisme "post-moderne", puisque la dite "déconstruction" (comme je l'ai compris : la visée de critique de tous les présupposés à l'oeuvre dans la langue philosophique, y compris les présupposés du rationalisme) rencontre des limites et a besoin de points d'appui (ici l'idée de "promesse émancipatoire");
* l'idée d'un écart infini entre l'ordre existant des choses et une promesse émancipatoire, participant à une dynamique de transformation du monde, mais qui ne s'achève jamais dans une société idéale; bref la piste du communisme comme mouvement infini et non comme société réalisable et achevable.
Bon autrement : bon anniversaire le Forum des amis de Lutte Ouvrière!
Par un "étranger" à l'univers trotskiste :t3xla: