Méthode globale ou syllabique?

Rien n'est hors-sujet ici, sauf si ça parle de politique

Message par pelon » 11 Oct 2006, 22:11

a écrit :
Méthode globale ou syllabique? Voilà la méthode de Robien!

Le ministre de l'Éducation, de Robien, part en guerre contre des enseignants qui ne suivraient pas "intégralement" les consignes concernant l'apprentissage de la lecture qu'il a données début 2006. En bref, il leur demande de revenir à la bonne vieille méthode syllabique, qui décompose les mots, et de bannir toute méthode globale ou semi-globale responsables, selon lui, des "20% de jeunes ne sachant pas lire à l'entrée en sixième".

Pour avoir émis des doutes sur les affirmations péremptoires du ministre, un inspecteur de l'Éducation nationale de Lille fait actuellement l'objet d'une procédure disciplinaire. Il y a quinze jours, un formateur d'inspecteurs n'a pas été reconduit dans sa fonction parce qu'un ouvrage qu'il a écrit a été jugé "déloyal à l'égard du ministre", et lui-même a été comparé par de Robien à "un moniteur d'auto-école chauffard". Pourtant, les textes officiels disent clairement qu'il faut utiliser "deux types d'approches complémentaires, l'analyse de mots entiers et la synthèse à partir de leurs constituants", ce qui n'exclut aucune des méthodes.

Cela n'a pas empêché l'ancien agent général d'assurances de Robien (qui s'est promu entre-temps spécialiste de l'apprentissage de la lecture) de rappeler mardi 10 octobre sur France-Inter qu'il fallait "commencer par des lettres et des sons". Et pour preuve de ses compétences dans ce domaine, il dit se baser sur des "fondements scientifiques" qui montreraient, selon lui, "que le cerveau est fait pour apprendre par éléments"!

Sans entrer dans le débat entre méthode globale ou méthode syllabique, rappelons cependant qu'il y a bien une trentaine d'années que la première a été abandonnée et que, "bien évidemment, dès le premier jour du CP, on apprend aux enfants le déchiffrage", comme le rappelle le principal syndicat d'enseignants du primaire, le Snuipp. Manifestement, le ministre de Robien ne semble pas très au courant de ce qui se pratique au quotidien dans les écoles primaires. Il ne prend pas non plus en compte le fait que l'apprentissage de la lecture est un phénomène bien plus complexe que l'application à la lettre d'une méthode miracle: sinon, comment expliquer que dans une même classe, sous la conduite d'un même enseignant, certains enfants apprennent vite à lire tandis que d'autres ont des difficultés? Comment expliquer qu'il y a moins d'illettrés dans les quartiers aisés que dans les cités de banlieue?

La méthode de Robien, elle, est simple, et même simpliste: elle consiste à spéculer sur les préjugés qui affirment, à tort, que dans le temps chacun savait lire et écrire, et à dresser un écran de fumée pour cacher le manque de moyens dont disposent les enseignants. Présenter la méthode syllabique comme la panacée et rendre responsables de l'échec scolaire les enseignants qui ne l'appliqueraient pas évite au ministre de répondre aux vrais problèmes - le manque de moyens - qui freinent l'apprentissage de la lecture.

Marianne LAMIRAL.

Lutte Ouvrière n°1993 du 13 octobre 2006
pelon
 
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Message par zejarda » 11 Oct 2006, 22:28

J'aime bien les articles de LO, c'est clair :-P
C'est limpide.
je rappelle l'émission de FI: http://www.radiofrance.fr/_c/php/listen.ph...ter_10102006.rm

il faut realplayer pour l'écouter.
zejarda
 
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Message par canardos » 20 Oct 2006, 05:04

une pétition signée par des scientifiques:

a écrit :

Il n'y a pas lieu d'imposer une unique méthode d'enseignement de la lecture
Les récents débats sur les méthodes d'enseignement de la lecture ont conduit un certain nombre de chercheurs en psychologie cognitive, neuropsychologie et sciences de l'éducation à rappeler les résultats des études d'évaluation de l'efficacité des différentes méthodes, et à formuler notamment les recommandations suivantes:

Il faut enseigner les relations graphèmes-phonèmes (entre les lettres et les sons) de manière systématique et explicite, dès le début du cours préparatoire.

Il existe de nombreuses manières d'enseigner les relations graphèmes-phonèmes: des approches synthétiques, combinant les phonèmes pour construire les syllabes et les mots; des approches analytiques, décomposant les mots en syllabes et en phonèmes; et des approches combinant à divers degrés les deux précédentes. Les études d'évaluation ne font pas ressortir de différences significatives d'efficacité entre ces différentes approches.
Les résultats scientifiques actuels suggèrent donc d'écarter les méthodes qui n'enseignent pas les relations graphèmes-phonèmes, ou qui ne les enseignent pas de manière explicite et systématique, ou qui ne les enseignent pas suffisamment tôt (souvent appelées "méthodes globales", ou selon les acceptions, correspondant à une partie des méthodes globales). Toutes les autres méthodes semblent acceptables.

L'arrêté de mars 2006 modifiant les programmes d’enseignement de l’école primaire a précisé les programmes de 2002, en restreignant l'éventail des méthodes d'enseignement de la lecture recommandées précisément à celles suggérées par les travaux scientifiques. Il s'agit donc là d'une évolution positive.

Conformément aux résultats scientifiques, les nouveaux programmes laissent aux enseignants le choix entre les nombreuses méthodes utilisant des approches synthétiques, analytiques, ou une combinaison des deux, dans la mesure où, quelle que soit la méthode choisie, l'enseignant prend soin d'enseigner les correspondances graphèmes-phonèmes, afin de développer l'automatisation de la reconnaissance des mots et la compréhension.

Compte tenu des textes de loi définissant les programmes, et compte tenu des travaux scientifiques qui les inspirent, il n'y a donc pas lieu d'exiger des enseignants le recours à une méthode unique. Il n'y a notamment pas lieu de leur imposer l'usage d'une méthode exclusivement synthétique (parfois appelée "la méthode syllabique").

Franck Ramus, Chargé de Recherches au CNRS, et Rémi Brissiaud, Maître de Conférences à l'IUFM de Versailles

Co-signataires:
Mireille Bastien-Toniazzo, Maître de Conférences à l'Université de Provence
Séverine Casalis, Maître de Conférences à l'Université Lille 3
Sylvie Cèbe, Professeur à l'Université de Genève
Pascale Colé, Professeur à l’Université de Savoie
Marcel Crahay, Professeur à l'Université de Genève
Jean-François Démonet, Directeur de Recherches à l’INSERM
Jean Ecalle, Maître de Conférences à l’Université Lyon 2
Michel Fayol, Professeur à l'Université Clermont-Ferrand II
Jacques Fijalkow, Professeur à l'Université Toulouse II
Daniel Gaonac'h, Professeur à l'Université de Poitiers
Roland Goigoux, Professeur à l'IUFM d'Auvergne
Jean-Emile Gombert, Professeur à l’Université Rennes 2
Jacqueline Leybaert, Chargée de Cours à l’Université Libre de Bruxelles
Annie Magnan, Professeur à l’Université Lyon 2
José Morais, Professeur à l'Université Libre de Bruxelles
Laurence Rieben, Professeur à l'Université de Genève
Liliane Sprenger-Charolles, Directrice de Recherches au CNRS
Annick Weil-Barais, Professeur à l'Université d'Angers
Pascal Zesiger, Professeur à l'Université de Genève
Johannes Ziegler, Directeur de Recherches au CNRS

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Voir notamment:
Ramus, F., Casalis, S., Colé, P., Content, A., Démonet, J. F., Demont, E., et al. (2006). Un point de vue scientifique sur l'enseignement de la lecture. Le Monde de l'Education, Mars 2006.
Et:
Sprenger-Charolles, L., & Colé, P. (2006). Pratiques pédagogiques et apprentissage de la lecture. Cahiers Pédagogiques, Mars 2006.

canardos
 
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Message par yannalan » 20 Oct 2006, 07:03

Je me souviens d'études faites dans les écoles du Québec, sur les méthodes d'enseignenemt plus généralement, qui concluaient en gros que l'efficacité était plus souvent due à la personnalité de l'instit et à ses relations avec la classe qu'aux méthodes employées...
yannalan
 
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Message par Valiere » 21 Oct 2006, 06:33

Ce qui importe là c'est l'accompagnement et les relations aux parents...La méthode n'est qu'un outil.
Valiere
 
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