(Harpo @ mardi 8 novembre 2005 à 21:01 a écrit : A peu près d'accord sur tout avec Cyrano, sauf qu'une interrogation subsiste :
a écrit :Savoir l'importance réelle des groupes de jeunes, ce n'est pas anodin : si c'est comme dans ma ville, ça veut dire que ce ne sont que les voyous ordinaires qui se retrouvent tout excités par les évènements.
Y a-t-il une partie des jeunes qui leur emboîte le pas ? On a entendu des témoignages à la radio de jeunes qui ne sont pas des voyous qui ont participé, au début, à Clichy, au bordel ambiant. Qu'en est-il maintenant ?… Est-ce que au fur et à mesure que ça s'étend, est-ce que les voyous ont le soutient d'une partie significative de la jeunesse des quartiers, ou cela va-t-il s'amenuisant ?
Il est probable qu'au départ, suite aux décès de deux jeunes à Clichy-sous-bois, il n'y a pas eu que des voyous qui se sont retrouvés dans la rue pour brûler des voitures (c'est stupide), répondre aux insultes de Sarko, affronter les flics (cela peut être juste). Mais les affrontements avec les "forces de l'ordre" sont devenus semble-t-il plus rares par la suite et les destructions d'écoles, les agressions de pompiers et autres saloperies sont devenues plus nombreuses.
Ceux qui sont réellement révoltés se sont probablement détournés de tout ça et leur révolte, contre le chômage, les contrôles au faciès ou à l'âge, contre les patrons racistes qui refusent de les embaucher, contre les directeurs d'agences qui leur refusent un logement par racisme ou parce que leurs parents n'ont pas assez de fric pour les cautionner... cette révolte légitime, ils ont dû la ravaler, grâce aux petites frappes qui occupent le terrain et font l'actualité du 20 heures sur TF1. C'est cette jeunesse là, qui n'est plus dans la rue ces derniers jours, qu'il faut toucher, pas les lumpen machistes et fouteurs de merde qui n'ont pas d'autre but que de brûler plus que ceux de la cité voisine. Ceux là il faudra les mettre hors d'état de nuire quand on le pourra; et ce ne sont pas les flics qui le feront vraiment, car finalement, ils sont leurs auxilliaires d'une certaine façon.
La question qui se pose quand même, c'est celle-ci : les dérapages de la police et les condamanations lapidaires que prononcent les tribunaux (et qui touchent certainement nombre d'innocents raflés au hasard et peu de vrais voyous) ne risquent-t-ils pas de faire qu'un certain nombre de révoltés se retrouvent à nouveau derrière les voyous, faute de mieux, pour exprimer leur colère.
Faute d'une analyse précise de ce que sont les "émeutiers" et de leurs motivations, analyse que les journalistes se gardent bien de faire sérieusement et que l'on ne peut faire (plus ou moins correctement) que là où l'on se trouve, il est difficile de ne pas déraper dans un sens ou dans l'autre. Les optimistes forcenés voient les prémisses d'une révolution, les militants plus prudents voient une société en train de sombrer et un boulevard offert à l'extrême droite. Je me range plutôt parmi les seconds, mais encore une fois, je n'ai pas de réponse absolument sûre et j'attends toujours d'être mieux informé.
Notre boulot, c'est de comprendre, d'analyser, de savoir comment et à qui on doit et on peut s'adresser pour que les dégats matériels et surtout en terme de conscience, ne soient pas irréparables. C'est aussi, tant qu'il reste certains doutes sur la réalité de la "révolte", de ne pas s'emballer et de continuer, ce qui n'est pas rien, à intervenir avec tous nos (petits) moyens dans le même sens et auprès du même milieu que nous le faisons habituellement, aux portes des boîtes, dans les boîtes dans les quartiers, sur les marchés. La situation est au moins telle que le plan d'urgence que nous avons essayé de populariser depuis maintenant 10 ans n'a jamais été autant d'actualité, n'a jamais eu autant de chances d'être approuvé, au moins verbalement par une large partie de la population.
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