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11 000 personnes ont défilé à Paris pour proclamer que le triomphe militaire ne légitime pas la guerre
LE MONDE | 14.04.03 | 14h05 • MIS A JOUR LE 14.04.03 | 18h03
Les manifestants menés par la coordination "Contre la guerre en Irak" étaient moins nombreux que lors des précédentes protestations. Le Parti des travailleurs organisait son propre rassemblement.
Samedi 12 avril, Yves N. a quitté sa banlieue pour rejoindre la place d'Italie à 15 heures. Là, il a sorti de son sac en plastique une pancarte portant d'un côté "Non au capitalisme US"et, de l'autre, en anglais pour être sûr que les Américains comprennent : "Bush dumb, Sharon's puppet" ("Bush imbécile, marionnette de Sharon"). Yves, levant sa pancarte, est parti se fondre dans la foule. Quelque 11 000 personnes (selon la police) s'apprêtaient à défiler jusqu'à Montparnasse, menées par la coordination Contre la guerre en Irak.
Bien moins nombreux que lors des précédents défilés (18 000 le 29 mars, 80 000 le 22 mars), les manifestants se trouvaient, sans toujours l'avouer, dans le même embarras que Jacques Chirac : comment persister dans une position antiguerre tout en se réjouissant de la chute de Saddam Hussein, comment demander la reconstruction de l'Irak par l'ONU sans légitimer a posteriori une situation obtenue par voie de guerre ? Les organisateurs s'inquiétaient des dérapages (agression antisémite, effigies de Saddam Hussein brandies) qui avaient assombri le défilé du 22 mars. Des mesures avaient été prises. Il n'y eut pas d'incident majeur. Trois personnes munies de "pancartes antisémites et incitant à la haine raciale" ont été placées en garde à vue, selon la police. Leurs drapeaux affichaient une croix gammée recouvrant, pour l'un le drapeau israélien, pour l'autre une étoile de David.
La centaine d'organisations politiques, syndicales ou associatives s'étaient mises d'accord pour réclamer un cessez-le-feu immédiat en Irak, le retrait des "troupes étrangères" et l'affirmation du rôle de l'ONU pour assurer la maîtrise par les Irakiens de leur destin politique et de leurs ressources économiques.
LO CONTESTE L'ONU
Cela donnait les slogans "L'Irak aux Irakiens", "US go home".La secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet, l'ex-dirigeante des Verts Dominique Voynet et le porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire, Olivier Besancenot, défilaient en tête du cortège, ainsi que des représentants du MRAP et de la plupart des organisations de gauche et d'extrême gauche. Le triomphe militaire ne légitime pas la guerre, disait-on en substance, de la CGT à Attac en passant par le Mouvement de la paix, la Ligue des droits de l'homme ou le MRC de Jean-Pierre Chevènement. En chantant L'Internationale, Arlette Laguiller et son parti Lutte ouvrière se distinguaient en contestant la légitimité de l'ONU dans la reconstruction de l'Irak.
Le Parti des travailleurs avait décidé de faire franchement bande à part. Refusant le caractère "festif" de l'autre manifestation, l'organisation trotskiste a défilé seule, le même jour, de la République à la Nation. Ils étaient 2 000, disaient-ils. Pas plus de 550, a corrigé la police. Daniel Gluckstein, secrétaire national du PT, a dénoncé le sentiment de "soulagement" face à la chute du régime de Saddam Hussein. "C'est pas à l'ONU, c'est pas aux USA, non l'Irak ne vous appartient pas", scandaient les militants.
Franz Derouin et Marion Van Renterghem